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Aujourd’hui, l’économie, c’est l’écologie : sans prise de conscience, les entreprises sont vouées à péricliter

Dans le contexte du détricotage de nombreuses politiques écologiques, Géraldine Poivert lance un appel aux entreprises à s’impliquer pour l’adaptation et le « développement durable ». Elle défend le « devoir renforcé de vigilance » – aussi appelé CS3D – actuellement débattu à Bruxelles et attaqué par des lobbys comme des Etats.

Par Géraldine Poivert (présidente de (RE)SET)

Publié le 10 Juil. 2025 à 17:45

Tricotons, détricotons, retricotons, la phraséologie sur le lent cheminement vers la transition environnementale emprunte beaucoup, depuis deux ans, à l’univers de la maille, une fois à l’endroit, une fois à l’envers ! Dans la réalité de la vie des entreprises, il en va heureusement autrement. Pour une raison simple : les faits sont têtus. Le réchauffement climatique s’accélère – première « alerte chaleur » de l’histoire en Alaska, début juin ! –, l’adaptation est incontournable, l’épuisement des ressources est devenu une évidence aux yeux de tous les dirigeants, comme en attestent les discours guerriers consacrés aux sous-sols du Groenland, du Canada, de l’Ukraine ou de la République Démocratique du Congo, pour ne citer que les plus médiatisés.

Certains « détricotages » de réglementations pourtant récentes se justifient par la complexité excessive des dits règlements. On pense à la CSRD (« Corporate Sustainability Reporting Directive ») et à ses milliers de catégories de données, par exemple. Le retricotage en cours passera par une simplification bienvenue. D’autres s’expliquent plus par des contingences que l’on qualifiera généreusement de « politiques », mais ne touchent pas forcément à l’essentiel.

En revanche, il serait malvenu de jeter le bébé avec l’eau du bain et dangereux de ne pas s’atteler à la chaîne de valeur des fournisseurs ! Ainsi la CS3D (« Corporate Sustainability Due Diligence Directive »), acronyme épouvantable que l’on se contentera de traduire par « devoir renforcé de vigilance », actuellement mollement défendue par Bruxelles et attaquée par un nombre croissant d’Etats et, hélas de dirigeants, dont la France et l’Allemagne.

Modifiée sans doute, allégée sûrement, mais pas supprimée ! Pourquoi ? Parce que la transition n’est pas une option et qu’elle ne se fait jamais seule. Sans fournisseurs amont et aval, ce fameux scope 3 du carbone, de l’adaptation, point de salut ! Les « supply chains » aveugles parlent de prix et de volumes, pas de qualité, d’impact, et de durabilité. Pas d’avenir, donc.

Une démarche vitale

La CS3D est une démarche vitale, fatale presque. Connaître ses partenaires, construire un éco systèmes de valeur, un collectif pour mieux sourcer ses approvisionnements, éco-concevoir ses produits, optimiser ses flux, ses process. Compléter la transaction d’une coopération nourricière pour innover et investir ensemble. Ce n’est pas de l’écologie c’est de la saine gestion. Et sans cela point de leader, point de croissance, mais un terrible jeu du mistigri : chaque étape de la chaîne de valeur cherche à passer la mauvaise carte au suivant…

Sans cette régulation-traçabilité-vigilance qui aurait pu et même dû être une auto-régulation, c’est le règne de l’opacité, au risque du travail des enfants, de l’esclavage des Ouighours, du plastique incorporé que l’on croit recyclé, du bois que l’on ne pensait pas issu de la déforestation, des plastiques bromés dans les jouets contrefaits, bref des retours de boomerang violents.

Sanctions judiciaires

Et l’alternative à l’auto-régulation ou la régulation est simple : le tribunal judiciaire. Les exemples se multiplient, qui concernent La Poste, TotalEnergies, Arkema, Daikin, Danone, Casino, BNPParibas ou même Apple : la responsabilité judiciaire des entreprises et de leurs dirigeants est désormais engagée quand l’environnement ou les critères sociaux sont oubliés, même par des filiales de filiales, à l’autre bout du monde. La jurisprudence en ces domaines se renforce partout dans le monde de jour en jour.

Le juge n’est pas forcément le mieux outillé pour connaître de ces sujets. Et les sanctions judiciaires ne sont pas forcément les plus appropriées non plus pour « aider » les entreprises à effectuer leur transition.

Aujourd’hui, l’économie, c’est l’écologie : sans prise en compte de la circularité et du développement durable, les entreprises sont vouées à péricliter à court, moyen ou long terme. La régulation vaut toujours mieux que le procès. Là plus qu’ailleurs, il est préférable de prévenir avec justesse que de prendre le risque de chuter puis de mal guérir.

Géraldine Poivert , fondatrice et directrice générale de (RE)SET, ambassadrice France 2030, membre du conseil d’administration de l’INEC

 

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