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BREAKING (RE)NEWS 2 août 2024

Trêve olympique oblige, cette Breaking (RE)NEWS estivale sera intégralement consacrée aux Jeux, car la transition, on le sait, est partout. Quitte à parfois prendre de petits chemins de traverse, que l’on nous pardonnera, place aux Jeux de Paris 2024, Verts ou pas Verts ? Disons le tout de go, les avis sont partagés sur la question. Comme souvent, les réponses divergent selon les acteurs et l’angle que l’on retient. Selon que l’on soit les organisateurs, les partenaires, des organisations non gouvernementales, que l’on énumère les dispositifs durables ou que l‘on s’intéresse aux sponsors de l’événement, il est impossible d’avoir un avis tranché !

Parmi les plus convaincus du caractère durable des Jeux Olympique de Paris (JOP), on trouve le ministère de la Transition écologique, qui sur son site vante les mérites de son action, estimant que les Jeux ont même représenté « une formidable opportunité pour la France d’accélérer sa transition écologique ». Avec des chiffres clefs qui parlent d’eux-mêmes :

Les trois angles retenus par le ministère sont détaillés sur son site :

  • Mieux transporter et se déplacer : transporter 800 000 personnes par jour, limiter les émissions carbone, proposer une offre de transport accessible pour les personnes en situation de handicap, décarboner les transports fluviaux et limiter au maximum l’impact des Jeux sur la mobilité quotidienne des usagers. Grâce aux investissements et solutions développées pour relever ces défis, tous les sites olympiques seront accessibles en transports en commun. En Île-de-France, 100 % des spectateurs peuvent se rendre sur les sites de compétition en transports en commun, à pied ou à vélo.
  • Mieux aménager, bâtir et se loger : la sobriété et la durabilité sont au cœur des Jeux de Paris 2024. Ainsi, 95 % des sites utilisés sont des infrastructures déjà existantes ou temporaires. Les quelques ouvrages créés spécialement pour l’évènement feront l’objet d’une reconversion après les Jeux. C’est notamment le cas du village des athlètes, inscrit dans la démarche de labellisation ÉcoQuartier, car pensé dans une démarche de ville durable.
  • Mieux préserver notre environnement et le climat : ces Jeux sont les premiers alignés sur les objectifs de l’Accord de Paris sur le climat. L’objectif est de diviser par deux leur empreinte carbone par rapport aux éditions précédentes. Une grande attention est également portée au patrimoine naturel et à la biodiversité des sites.

Le comité d’organisation des Jeux n’est pas en reste pour mettre en avant les efforts réalisés. Reprenant les thèmes mis en avant par le Ministère, les organisateurs ajoutent notamment la question de la circularité, qui nous est chère chez (RE)SET. Ils ont donc organisé « des jeux plus circulaires », lit-on sur leur site, qui souligne notamment que « il faut beaucoup de ressources, matériaux et objets pour organiser les Jeux Olympiques et Paralympiques. Pour les gérer plus durablement et limiter les déchets, Paris 2024 a misé sur l’économie circulaire. » Ce principe se retrouve dans l’aménagement intérieur des quelque 40 sites de compétition et de non-compétition. Tentes, cloisons, chaises, ordinateurs, équipements sportifs ou signalétique… Pour chaque objet, Paris 2024 a questionné le besoin et mutualisé l’utilisation quand cela est possible. Cette démarche a par exemple permis de réduire de près de 25% le nombre d’articles de mobilier, passant de 800 000 nécessaires au départ à environ 600 000. A l’issue de ces efforts de réduction, Paris 2024 a privilégié la location ou la mise à disposition plutôt que l’achat, à hauteur de 90%. Pour l’accueil des publics, et en particulier dans la restauration, Paris 2024 a également pris des engagements forts pour limiter la quantité de déchets liés à l’évènement, notamment grâce au déploiement de fontaines et à des emballages consignés. Enfin, Paris 2024 a encouragé l’éco-conception en l’intégrant au maximum dans ses produits et services : choix de matériaux plus naturels ou bas carbone comme le bois, réemploi, approvisionnement plus local, fabrication française, travail avec des acteurs de l’économie sociale et solidaire… A titre d’exemple : une partie du mobilier du Village est issue du réemploi ou de filières de recyclage : dans les espaces communs, on trouve des poufs en toile de parachute, des tables fabriquées à partir de 90% de volants de badminton usagés ou encore des chaises et canapés en barrière. Dans les chambres, les sommiers sont fabriqués en carton pour pouvoir être recyclés après les Jeux et les 16 000 matelas sur lesquels dorment les athlètes seront donnés à plusieurs bénéficiaires dont Emmaüs, l’École hôtelière ou encore l’École de ballet de l’Opéra de Paris.

Bel effort, reconnaissons-le

L’histoire ne dit pas, ou plutôt pas encore, si les athlètes ont ben dormi

Côté ONGs, au moins l’une d’entre elles se montre plutôt convaincue : le WWF. Il faut dire qu’un partenariat stratégique avait été conclu entre elle et Paris 2024. Et comme le disait Tony Estanguet, « notre partenariat stratégique avec le WWF France et la Caisse des Dépôts et Consignations garantit que les meilleures pratiques de soutenabilité sont au cœur de notre candidature. » Le WWF n’en a pas moins profité pour lancer une campagne maline, autour du slogan : « Oui aux records olympiques, non aux records climatiques », avec notamment une vidéo très bien faite sur un texte lu par le journaliste sportif emblématique (pour les plus de 50 ans) Nelson Monfort, listant « les records à ne pas battre ». Bien vu.

Seulement voilà, il est possible de voir les choses sous un angle différent, ce qu’ont fait d’autres experts et ONGs, qui fort logiquement s’intéressent surtout au volet « transport ». Les transports représentent environ, comme la construction des infrastructures, un tiers des émissions. Car une part non négligeable des spectateurs est venue par avion, et de très loin. Selon l’office de tourisme de Paris, sur les 11,3 millions de visiteurs attendus (hors épreuves paralympiques), 1,5 million viendraient de l’étranger, dont 65 000 de destinations long-courriers. « De quoi faire exploser le bilan carbone », réagit Alexandre Florentin, conseiller de Paris Génération écologie. Il estime qu’on aurait notamment pu « limiter par tirage au sort le nombre d’arrivées de pays lointains ». Plus largement, il considère qu’il aurait fallu « réduire le nombre d’épreuves et le périmètre de cet événement ». Dans ce contexte, « le comité d’organisation fait tout ce qu’il peut pour verdir les Jeux, dans les limites, cependant, du système actuel, analyse Christine Nedelec, présidente de France Nature environnement Paris. Au final, ses efforts sont comparables à ceux du colibri face à l’incendie », lit-on ainsi dans La Croix.  Et ce n’est pas « la compensation des émissions par l’achat de certificats, peu fiables, qui ne compensent pas toujours autant qu’ils le promettent » qui vont changer la donne. La question du transport aérien reste donc prégnante, même si l’image du ciel vide (interdiction de survol) à plus de 150 kilomètres autour de Paris pour la cérémonie d’ouverture peut faire illusion.

A la pointe des insatisfaits, on compte le média Reporterre, qui depuis des mois fait le compte des « destructions » qui feraient de ces JO « une catastrophe sociale et écologique », pour reprendre les termes de ce média militant. Cette illustration résume l’analyse très critique des impacts des Jeux, selon Reporterre. Côté nettoyage social, les « indésirables » — sans-abri, personnes migrantes, habitants et habitants des quartiers populaires — ont été expulsés pour construire des nouveaux quartiers flambants neufs. Selon les chiffres compilés par le collectif Le Revers de la médaille, plus de 12 000 personnes auraient été expulsées pour cet évènement. Ces jeux sont également, estime ce média, une « catastrophe écologique » puisque 1,58 million de tonnes d’équivalent CO2 seront rejetés dans l’atmosphère par les voyageurs qui viendront du monde entier.

Côté sponsors, si EDF s’en sort très bien avec sa vasque électrique, la présence de Coca-Cola (leader du plastique à usage unique jetable), de Samsung (et ses terres rares) et surtout de Toyota (construction automobile) sont dénoncés par l’ensemble des acteurs de l’environnement…

Et pour être complet quant aux détracteurs des JO, il ne faudrait pas oublier les militants extrémistes d’Extinction Rébellion qui ont tenté sans succès de perturber les jeux. Le Parisien nous révèle que ce sont au total 45 militants d’Extinction Rébellion qui ont été interpellés la semaine dernière en différents points de la capitale. Il y avait déjà eu 14 arrestations entre l’Île de la cité et Châtelet. Trente-et-un autres militants venu à Paris ont été repérés dans les Ier et VIe arrondissements et placés en garde à vue « pour participation à un groupement formé en vue de commettre des violences ou des dégradations ». Une vision radicale de l’écologie aux antipodes de la nôtre, que vous trouverez explicitée ici, sous la plume de Géraldine Poivert, cofondatrice de (RE)SET.

Au final, les lecteurs assidus de la Breaking (RE)NEWS s’en doutaient, il est en réalité impossible de trancher sur le caractère « durable » de ces jeux. Il est indéniable que des efforts importants ont été faits et des progrès enregistrés. Il est clair aussi que le concept même des JO, tel qu’il s’impose encore aujourd’hui, ne permet pas de « contribution environnementale positive nette ». Le plus sage est sans doute de se rendre à l’avis publié par l’ADEME : il faudra un jour, effectivement, « complètement repenser le concept des Grands événements sportifs internationaux (GESI) », sans doute en les fractionnant, en choisissant des dates différentes, en repensant les lieux d’organisation afin de les amener au plus près » du citoyen.  

Avant de clore cette « Breaking (RE)NEWS spéciale Jeux », trois éclairages supplémentaires s’imposent, dans la logique de nos rubriques traditionnelles.

D’abord la baignade dans la Seine de la semaine : avant les triathloniens, c’était fait pour la Maire de Paris, issue positive d’un feuilleton dont la Breaking (RE)NEWS s’était fait l’écho, mais on ne connaît l’épilogue de cette baignade que depuis quelques jours : tout compte fait, ce jour-là, la qualité de l’eau n’était pas conforme aux minimum requis, nous dit Libération ! Concrètement, les seuils de bactérie E.Coli recommandés par les autorités sanitaires européennes ont été dépassés. A la décharge d’Anne Hidalgo, il faut rappeler que l’analyse bactériologique des prélèvements de la Seine prend 24 heures et que les derniers résultats disponibles étaient donc ceux de la veille, qui eux étaient conformes. L’épilogue de l’épilogue ayant par ailleurs été qu’aucun des baigneurs ne s’est plaint de la moindre contrariété intestinale ou dermatologique. Et au pire, expliquait l’entraineur de natation Philippe Lucas sur RMC, concernant les triathlètes « À Rio, c’était le même problème, à Tokyo, c’était le même problème. À Paris, c’est pareil, mais ils vont nager et puis c’est tout. Ils auront deux boutons sur le c**, point à la ligne, et puis tout ira bien ». Voilà qui a le mérite d’être clair.

Plus sérieusement, et pour aller au fond des choses, cela nous ramène à une question plus générale et fondamentale : la gestion des matières fécales à Paris. Dans un article passionnant, The Conversation nous rappelle que plus de 99,9 % de la contamination microbiologique présente dans les eaux usées provient des matières fécales, alors qu’elles ne représentent que 0,1 % du volume des eaux usées produites par personne et par jour. Séparer les matières fécales des eaux usées permettrait ainsi de retirer la quasi-totalité du risque. Oui mais voilà : la France a fait le choix du « tout à l’égout » au 19e siècle et s’y tient depuis. Bien que les eaux usées soient désormais principalement traitées dans les stations d’épuration, ces systèmes ne sont souvent pas conçus pour éliminer efficacement les pathogènes fécaux. De ce fait, les risques sanitaires persistent. En France, seulement 1,6 % des stations de traitement des eaux usées (STEU) sont équipées d’un traitement désinfectant. En outre, dans beaucoup de villes, et à Paris en particulier, les eaux usées domestiques sont, par temps de pluie, mélangées aux eaux de ruissellement dans un égout dit unitaire, où les eaux usées et les eaux pluviales transitent par une seule et même canalisation. Ces égouts possédant des capacités forcément limitées, cela entraîne mécaniquement, à chaque pluie dépassant une certaine intensité, des déversements d’eaux pluviales mélangées aux eaux usées domestiques. Des solutions existent : la gestion des fèces par le tout-à-l’égout, même si elle est devenue la norme dans les villes des pays occidentaux, n’est pas la seule manière de gérer les matières fécales. D’autres systèmes existent, basés sur une gestion différenciée des effluents et communément nommés « séparation à la source ». Ces autres systèmes reposent souvent sur une gestion sèche des matières fécales afin de limiter leur dilution. Ils ont été la norme pendant des siècles et se réinstallent progressivement en France, en milieu rural, mais aussi en milieu urbain. Aujourd’hui, ils sont à nouveau déployés au cas par cas. En témoignent des projets par exemple en Bretagne ou à Bordeaux. Historiquement, ces systèmes ont posé problème pour l’évacuation des matières et la diffusion d’odeurs nauséabondes dans les immeubles et les rues, notamment lors de la vidange. Ces désagréments ne sont pas une fatalité, pour autant que l’on accorde du soin à la gestion des matières fécales. En observant les pratiques des utilisateurs sur le terrain, il apparaît que la gestion sèche des matières fécales pourrait offrir une meilleure maîtrise du risque sanitaire en confinant les matières de la toilette jusqu’à un traitement hygiénisant. Chez (RE)SET, on s’intéresse aussi aux micropolluants dans l’eau, mais on en a pas fini avec les déchets organiques !

Trêve de matières fécales, et pour le plaisir des images, en voici deux pour nous rappeler que la baignade dans la Seine, dont on espère qu’elle restera possible à l’avenir, était traditionnelle à Paris depuis le 12e siècle et même très à la mode dans les années 1920 :

Une image pas si éloignée de celle-là, qui date de quelques jours :

Dans notre rubrique biodiversité animale (oui, c’est un peu tiré par les cheveux, ou plutôt par les poils, mais c’est l’été), la petite bébête de la semaine se nomme Beacon, le chien de l’équipe américaine ! Un Golden retriever de 4 ans, membre à part entière de l’équipe en sa qualité de « chien de thérapie ». Comme le rapporte le site USA Today, le chien a été adopté par Tracey Callahan Molnar, une ancienne coach de gymnastique rythmique. Il a été formé afin d’accompagner, réconforter et supporter les athlètes. Beacon fait partie d’un programme de thérapie canine datant de février 2023. Au total, ce sont 16 chiens qui ont été intégrés à ce programme. Comme quoi nos amies les bêtes ont, elles aussi, un rôle à jouer dans la compétition.

Et bien sûr, il ne faudrait pas oublier le « meilleur ami de l’homme », autrement dit le cheval, qui a tenu un rôle crucial dans les épreuves d’équitation…

La devinette de notre précédente édition était une photo un brin mystérieuse. L’indice était que toute ressemblance avec un jouet bien connu serait … partiellement trompeuse ! Et de fait, le fabricant de jouets Lego n’est pas étranger à cette brique, mais elle ne tiendrait pas dans la main d’un enfant. Car elles sont le résultat d’une collaboration avec des scientifiques de l’Agence Spatiale Européenne (ESA)Inspirés par le « LEGO System in Play » (système de jeu LEGO). Ils se sont penchés sur une météorite datant de 4,5 milliards d’années pour imprimer des briques en 3D. Et ces briques LEGO s’inscrivent dans un projet épique visant à concevoir (et bientôt à construire) des rampes de lancement et des refuges pour… les astronautes sur la Lune. Comme il est difficile et coûteux d’envoyer des matières premières (ou transformées) sur la Lune, les scientifiques ont cherché quelle matière pouvait être trouvée sur place pour construire des habitats. Or il n’y a, on le sait, pas grand-chose là-bas, sauf du régolithe. Il n’y en a pas sur terre (sauf quelques grammes ramenés des expéditions lunaire), mais ce qui en approche le plus est la poussière d’étoile, issue des météorites tombées sur notre planète.  D’où l’idée de constituer ces briques qui pourraient être fabriquées sur place. Pour les fans de Lego et les fans de l’espace, quelques briques seront présentées dans certains LEGO Stores et notamment celui de Paris (aux Halles) durant l’été.

La devinette de cette semaine a un lien, forcément, avec les Jeux. Et comme il fait chaud, elle est facile. A quelle occasion cette photo magique a-t-elle donc été prise ?

Bonnes lectures, bon week-end et bonnes vacances !

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