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BREAKING (RE)NEWS DU 12 JANVIER 2024 : DEREGLEMENT CHROMATIQUE!

En 2024, tout change, mais pas la Breaking (RE)NEWS ! Et si l’on vous souhaite bien sûr une excellente année de transition réussie, c’est pour vous rappeler aussitôt qu’elle ne se fera pas toute seule : il faut agir, agir, agir. Cela tombe bien, nous avons désormais un Premier Ministre jeune et plein d’ « énergie », comme dit le Président. Gabriel Attal, qui a aussi la charge de la planification écologique, l’a revendiqué : il veut « des résultats, des résultats, des résultats ». Qui par définition ne peuvent résulter que d’actions 😉 L’heure est donc au retroussage de manches. En attendant, on va le voir, le défi de la transition environnementale et économique ne s’est pas précisément allégé durant les fêtes !

C’est désormais officiel : l’année 2023 aura été la plus chaude jamais enregistrée dans l’histoire de l’humanité et même depuis « au moins 100 000 ans », nous disent les spécialistes. Pour l’anecdote, il s’agit pour la France de la deuxième température la plus élevée, juste après 2022.

Sans aucun doute la conséquence de l’évolution du taux de concentration de dioxyde de carbone dans l’air, ici mesuré en « parties par millions » (PPM), qui continue d’augmenter, aussi lentement que sûrement :

Un indice révélateur de la gravité de la situation peut être trouvé en France à la lecture du Figaro qui, après avoir donné la parole pendant des décennies aux climato-sceptiques semble avoir (définitivement ?) viré sa cuti, comme on le lit ici et surtout là, avec cet article opportunément titré : « La quasi-totalité des événements climatiques extrêmes de 2023 ont été causés par le réchauffement climatique ». Au moins, la prise de conscience continue-t-elle de progresser, donc.

Et c’est tant mieux car, nous dit Valérie Masson-Delmotte, ancienne dirigeante du GIEC, cela ne peut pas s’arranger, bien au contraire, si l’on se limite aux engagements pris dans le cadre de la COP 28. Habile transition pour évoquer la COP 29, dont l’on connaît désormais le Président Mukhtar Babayev ancien cadre de la compagnie pétrolière et gazière nationale de l’Azerbaïdjan, SOCAR. Après Dubaï, « l’histoire bégaie », notent les observateurs…

Grandes causes, petits effets, le réchauffement va obliger à revoir la gamme chromatique des fameuses « warming stripes », ces bandes de couleur, inventées par le climatologue britannique Ed Hawkin, qui représentent l’évolution du climat. Un « dérèglement chromatique, comme le dit joliment Libération. Le rouge n’est plus assez rouge, si l’on résume. Les prochaines bandes seront de plus en plus foncées, tirant vers un noir se voulant apocalyptique. La preuve en images, comme on dit, et un rappel des représentations les plus symboliques des fameuses « bandes » :

Pour en finir avec la vision la plus « macro » possible de la transition cette semaine, un petit rappel politique au niveau mondial, potentiellement glaçant, même s’il ne fera pas baisser les températures du globe pour autant😉 : l’année 2024 s’annonce riche en élections, et même très riche. Pour tout dire, du jamais-vu depuis la création du suffrage universel en 1792 ! La moitié de la population mondiale en âge de voter est appelée aux urnes. Non que cela soit une preuve de vitalité de la démocratie, cette proportion englobant de nombreux (et vastes) pays dans lesquels le vote change peu la donne (Chine, Russie, …). Mais tout de même, si l’on doit se référer aux récentes expériences néerlandaise ou argentine, par exemple, il semble que ce qui est perçu comme la difficulté à résoudre l’équation « fin du monde et fin du mois » se traduise, en période pré-électorale surtout, par une explosion du populisme et de la démagogie anti environnementale. Ni l’Union Européenne (cf la « pause réglementaire » en cours) ni la France ne sont épargnées, à en lire cette chronique de Stéphane Foucart dans Le Monde : « L’extrême droite et la crise écologique sont les deux portions d’un même cercle vicieux », de sorte qu’ « alors que la préférence nationale va faire son entrée dans le droit français, l’autre grande victoire culturelle des droites extrêmes est la conversion de tout le camp conservateur à l’hostilité vis-à-vis des politiques environnementales ». Prions qu’il ait tort 😉

Une bonne nouvelle pour débuter nos rubriques hebdomadaires, avec des entreprises françaises qui gagnent de l’argent, beaucoup d’argent. Qu’on en juge : 2023 a permis aux 40 plus grandes entreprises françaises de pulvériser à nouveau leur record historique des dividendes versés, avec plus de 97 milliards d’euros, dont 67 milliards sous forme de dividendes, en hausse de 20 % par rapport à 2022. La concentration reste forte puisque six entreprises (TotalEnergies, BNP Paribas, LVMH, Stellantis, Axa et Sanofi) représentent plus de la moitié de tous ces versements. Dans ce monde magique du CAC 40, comme dit Philippe Escande, la bonne nouvelle n’est pas limitée aux seuls heureux actionnaires puisque ces dividendes distribués n’ont pas empêché des investissements record, en hausse de 20 % et un emploi en légère augmentation, à près de 5 millions de salariés. Plus discutables, pour dire le moins, sont les « superprofits » ayant permis les « superdividendes » distribués par les compagnies pétrolières et gazières, qui persistent -pour l’essentiel- dans leur modèle de développement. Plus de 100 milliards de dollars ! C’est ce que devraient recevoir les actionnaires des cinq plus grandes majors occidentales (BP, Shell, Chevron, ExxonMobil et TotalEnergies) pour l’année 2023, estime l’Institute for Energy Economics and Financial Analysis. Ce montant dépasse le record déjà enregistré en 2022. Alors que le monde plonge dans la crise climatique, l’industrie pétrolière persiste sur le même modèle. Détail révélateur : la somme promise par Shell à ses actionnaires pour 2023 est six fois plus importante que celle qu’elle alloue au développement des énergies renouvelables… 100 milliards de dollars, c’est aussi plus de 100 fois le montant promis pour le fonds pertes et dommages lors de la COP28.

Enchaînons avec une autre bonne nouvelle de la semaine : la capacité mondiale de production d’énergie renouvelable (EnR) a augmenté de 50% en 2023. L’Usine nouvelle, reprenant les chiffres de l’Agence Internationale de l’Energie (AIE) précise que le solaire est à l’origine de 75% de cette progression et que la Chine n’y est pas pour rien. Les capacités de production de panneaux solaires photovoltaïque en Chine depuis l’année dernière ont doublé, selon le rapport. L’Empire du milieu a provoqué une surabondance de son offre, entraînant une chute des prix des panneaux chinois de près de moitié au cours de l’année 2023. Si les politiques et les conditions de marché actuelles restent inchangées, le géant asiatique pèsera 60% de la croissance mondiale des capacités d’EnR entre 2023 et 2028. La Chine devrait ajouter plus de 2 000 GW d’EnR à son bouquet d’énergies renouvelables, tandis que le reste du monde ajoutera 1 600 GW. La République populaire pèse lourd, loin devant l’Union européenne (+400 GW), les États-Unis (+350 GW), et l’Inde (+200 GW). Ce qui ne pas sans poser question, car pour reprendre l’expression du Monde, « il y a donc un éléphant dans la pièce » : la Chine. Ce pays est de loin celui qui installe le plus de renouvelables sur son territoire. Mais il est aussi le fournisseur du monde. Il contrôle 80 % de la filière photovoltaïque. « La dépendance du reste du monde est totale », souligne le quotidien du soir. Il est devenu indispensable à la réalisation des objectifs 2030. Fermer ses frontières à la Chine, c’est renoncer à ses ambitions climatiques. Quel formidable arme aux mains d’un pays pas toujours ami…

A propos de souveraineté, les autres ressources problématiques de la semaine concernent les mines et le raffinage. « Les mines, enjeu de souveraineté national face aux réticences locales », d’abord. Car on ne peut pas tout avoir : se plaindre de notre dépendance et refuser l’installation de mines sur son sol car elles seraient peu esthétiques, éventuellement malodorantes et impropres au tourisme ! Mais le choix, en réalité, n’existe pas : sans contrôle de nos mines, pas de souveraineté possible. Et ce qui vaut pour les mines vaut presque plus encore pour le raffinage. Un secteur, là encore, où la Chine possède au moins une décennie d’avance. Le Figaro le rappelle : Pékin a d’ores et déjà décidé d’utiliser sa domination dans les métaux critiques. Sa dernière mesure, celle interdisant d’exporter des technologies liées à l’extraction des terres rares, est révélatrice de l’importance de cette question du raffinage. La Chine dispose de moins de 40% des réserves mondiales de terres rares, mais en extrait 60% et en raffine plus de 90%!  De même, ce pays ne pèse pas beaucoup dans l’extraction du lithium mais il en raffine 70% de la production mondiale. La situation est similaire pour le cobalt, le graphite, le silicium ou même l’aluminium et, dans une moindre mesure, le cuivre et le nickel. Depuis la pandémie de Covid, poursuit Le Figaro, la France a pris conscience de la nécessité de rétablir sa souveraineté industrielle. Cela passe par l’implantation de nouvelles usines en lien avec cette transition énergétique.

Les nouveautés de la semaine (et de l’année 2024), se sont aussi la réutilisation des eaux usées dans l’agriculture et la généralisation du tri des biodéchets. Depuis le 28 décembre 2023, les agriculteurs peuvent, dans certaines conditions, utiliser l’eau usée pour arroser leurs plantations. C’est très encadré, cela nécessite une autorisation administrative, mais c’est l’une des mesures du « plan eau » qui se met en place, raconte Libération. Avant de pouvoir vendre ses salades aux eaux usées, l’agriculteur devra, entre autres, les laver à l’eau potable. Une technique utilisée de longue date en Israël, où cela fonctionne fort bien. Quant au tri des biodéchets, si vous avez de la chance, vous avez déjà dû admirer ces poubelles marrons qui se multiplient : depuis le 1er janvier, il est même obligatoire de les trier. Petit problème, nous dit Le Monde reprenant le dernier rapport de l’ADEME, « moins d’un Français sur trois devrait bénéficier d’une solution de tri à la source des biodéchets au début de l’année, comme le prévoit pourtant la loi ». Le retard est tel que l’objectif assumé par l’Etat est seulement de couvrir 40 % de la population (27 millions de personnes) d’ici à la fin 2024. L’obligation figure pourtant dans la loi (pour la croissance verte) depuis 2015 et l’échéance du 31 décembre 2023, fixée par la directive européenne sur les déchets en 2018, a été transposée dans le droit français par la loi « anti gaspillage et pour une économie circulaire » (AGEC) de 2020. Comme s’interrogent Les Echos: « Mais où sont les poubelles marrons ? » il faut dire que cette collecte est complexe : le bio déchet, cela ne peut rester longtemps dans la poubelle du fait des odeurs et du pourrissement. Donc un gros défi, qui suppose des investissements et des priorisations.

Le durcissement de la semaine est à trouver du côté du Nutriscore, ce qui ne fait pas que des ravis. L’Usine Nouvelle l’annonce : afin de mieux lutter contre les aliments ultratransformés (AUT), les excès de sucres, de graisses et de sels sont désormais plus durement notés. Le mode de calcul du Nutri-Score devient en effet plus exigeant en 2024. À compter du 1er janvier, mais assorties d’une période de transition de deux ans pour permettre la mise à jour des emballages, « les modifications portent à la fois sur les aliments solides et les boissons, afin de mieux coller aux recommandations nutritionnelles, comme le fait de consommer plus de fruits et légumes, ou moins de produits sucrés ».

La pollution de la semaine nous vient à nouveau du plastique. Un conteneur perdu en mer a provoqué une marée gigantesque de granules en plastique, sur les plages du nord de l’Espagne. C’est loin d’être une première. Selon la Commission européenne, chaque seconde, en Europe, environ 265 000 de ces granulés se retrouvent dans l’océan, perdus par l’industrie lors des phases de fabrication, de stockage ou de transport. Au niveau mondial, c’est 230 000 tonnes de ces microbilles (dont 160 000 dans l’Union européenne) qui finiraient chaque année dans l’environnement, selon l’ONG Surfrider Foundation, qui se plaint du manque de régulation sur le transport de ces granulés.

Plastique toujours, la mauvaise nouvelle de la semaine est que l’on savait que les bouteilles d’eau minérale en contenaient, mais pas à ce point ! Selon une nouvelle étude scientifique, les bouteilles d’eau minérales contiennent environ 100 fois plus de plastique que ce que l’on pensait. Les nanoparticules de plastique, désormais identifiées, sont au nombre de 240 000 par litre d’eau, en moyenne…  

La frayeur de la semaine concernait les grands fonds norvégiens : il s’en est fallu d’un cheveu (blond) que leur exploitation à des fins minières et commerciales soit accordée. Mais la fronde parlementaire et de l’opinion publique a été telle que l’autorisation n’a finalement été donnée que pour une « exploration », et non une « exploitation » des trésors méconnus des abysses… Mais si l’exploration découvre effectivement des trésors, la tentation de l’exploitation sera forte.

L’absurdité de la semaine n’est pas passée inaperçue et c’est tant mieux. De nombreux médias ont relayé l’émotion des réseaux sociaux face à l’annonce d’une trouvaille commerciale très dispensable : récupérer et vendre les morceaux de glace échappés du Groenland pour les acheminer (en bateau alimenté au fioul) jusqu’au fond des verres à cocktail des soirées chics de Dubaï… Quand la cupidité humaine le dispute à son irresponsabilité…

La devinette de la semaine s’adresse plutôt aux ingénieurs et l’auteur de ces lignes serait bien en peine de vous aider s’il n’avait un pense-bête sous les yeux. Que représente donc ce graphique et quelle information nous donne-t-il sur nous-mêmes ? L’indice : il est ici question d’une légèreté presque insoutenable…

Bonnes lectures et bonnes fêtes !  

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