Breaking (RE)NEWS du 20 septembre 2024
Hello,
Dans l’hypothèse où vous liriez ces lignes dimanche, vous auriez un avantage sur nous : vous connaîtriez, si tout va bien, la composition du gouvernement Barnier. Pour notre part, nous en sommes encore réduits aux hypothèses. Déjà, pourtant, les indices se multiplient qui ne vont pas dans le sens d’une attention accrue portée aux questions de transition environnementale et économique pour les prochaines années. Au moins se consolera-t-on en constatant qu’à Bruxelles, en revanche, les choses ont bougé, plutôt dans le bon sens.
D’abord trois indices concordants, donc. Le premier est la décision peu heureuse, selon les gazettes, d’un détachement du Secrétariat Général pour la Planification Environnementale (SGPE) des services de Matignon. L’idée, paraît-il, est de bien dissocier ce qui relève du « politique » de ce qui relève de l’administratif. Pas sûr que la mise à l’écart, comme entité administrative, du SGPE, soit une bonne nouvelle. Comme le rappelle Le Monde, l’annonce en 2022 par Emmanuel Macron du rattachement au premier ministre de la gestion de la « planification écologique » avait constitué « une réelle avancée ». Entre les deux tours de la présidentielle, le candidat Macron avait promis de transformer la France en « grande nation écologique », « la première à sortir du gaz, du pétrole et du charbon ». La création du SGPE répondait à cette juste ambition. Elle a amorcé un progrès : à la traditionnelle politique en silos – transports, industrie, logement, … – dominée par Bercy a commencé de se substituer une stratégie globale appuyée sur des objectifs durables de réduction des émissions de carbone. L’impulsion et les arbitrages exercés par cette nouvelle entité se sont révélés d’autant plus efficaces que le secrétaire général, Antoine Pellion, cumulait cette fonction avec celle de conseiller écologie du premier ministre. Ce n’est désormais plus le cas. En même temps, comme on dit, peut-être s’agit-il d’une reconnaissance du principe de réalité. Déjà, rappelle Le Monde, « le désintérêt de Gabriel Attal pour ces sujets avait notablement affaibli la structure ». Un membre anonyme de l’équipe de Pellion s’est un peu répandu dans les journaux pour expliquer que « depuis l’arrivée d’Attal, le SGPE n’avait plus gagné un seul arbitrage » et n’était plus guère consulté. Deuxième indice : le budget. La « lettre plafond » adressée par Matignon au ministère de la transition écologique pour son budget 2025, inopinément rendue publique par Médiapart, prévoit des baisses de crédit, en totale contradiction avec les objectifs fixés. Troisième indice : on susurre depuis quelques jours que la prochaine Ministre à la transition sera une revenante de ce Ministère, Agnès Pannier-Runacher, au profil assez technicien, ce qui n’augure pas d’un nouvel élan.
On espère que ces indices se révèleront trompeurs. Car les dossiers laissés « en jachère » depuis le début de la séquence électorale sont consistants. Qu’on en juge, avec Libération, qui en a dressé une liste (très) partielle :
- La loi de programmation sur l’énergie et le climat (LPEC), qui a pourtant le rôle clé de définir les objectifs et les priorités d’action de la politique énergétique nationale. Elle devait être publiée avant le 1er juillet 2023 et c’est une obligation européenne. Dans la foulée, il faudra traiter de la stratégie nationale bas carbone, qui fixe les budgets carbones et les trajectoires de décroissance des émissions par secteur. Même constat du côté de la Programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE), qui aurait dû être actée l’été dernier.
- Le plan national d’adaptation au changement climatique qui devait être arrêté au début de l’été. Le texte, qui doit préparer la résilience de la France face à un réchauffement de 4 °C, est finalement passé à la trappe après la dissolution de l’Assemblée.
- La biodiversité : c’est une des rares bonnes nouvelles. Adoptée ric-rac en juin, la loi européenne sur la restauration de la nature est entrée en vigueur le 18 août. Reste maintenant, à la charge du nouveau gouvernement, de planifier son application ces deux prochaines années.
A Bruxelles, en revanche, les choses semblent bouger plutôt dans la bonne direction, si l’on devait se fier au choix de commissaires européens effectué par les Etats membres et Ursula von der Leyen. La nouvelle Commission européenne semble apte à préserver le Pacte vert et même à l’ « industrialiser », pour reprendre le titre de Actu-Environnement. Les nouveaux périmètres et intitulés des portefeuilles l’illustrent, avec une approche transversale de ce sujet. « La toile de fond est la compétitivité dans la double transition, a expliqué la présidente lors de la présentation de l’organigramme, le 17 septembre, se targuant d’avoir « démoli les anciens silos rigides » pour « construire une économie compétitive, décarbonée et circulaire – avec une transition équitable pour tous ». Ainsi, Teresa Ribera (Espagne – S&D) sera chargée de la Transition propre, juste et compétitive. L’industrie est aussi une prérogative attribuée à Stéphane Séjourné (France – Renew). Le représentant français sera chargé de la Prospérité et de la Stratégie industrielle. Pour le député européen Pascal Canfin (France – Renew), « ces deux portefeuilles sont très complémentaires et non pas en concurrence ». Les commissaires espagnol et français devront aussi composer avec le Danois Dan Jørgensen (S&D), potentiel commissaire à l’Énergie et… au Logement, une nouveauté notable. Le commissaire chargé du Climat aura également son mot à dire. Il pourrait s’agir du Néerlandais Wopke Hoekstra (PPE), à ce poste depuis 2023. On peut donc s’attendre à de la continuité sur la question. Enfin, un portefeuille intitulé Environnement, Résilience hydrique et Économie circulaire compétitive fait son apparition et met en avant de nouvelles priorités. Jessika Roswall (Suède – PPE) est désignée pour le prendre en charge.
Rêvons un peu : et si Michel Barnier, d’ici dimanche, sortait de sa manche un « Ministre de l’économie circulaire » ? Pour le coup, on l’applaudirait, chez (RE)SET ! En attendant, pour continuer de rêver, regardons l’ancien ministre de l’Environnement en plein nettoyage d’un lac de sa région, il y a une trentaine d’années
Pendant ce temps-là, l’urgence environnementale est toujours plus… urgente, comme en témoigne notre rubrique habituelle, la « météo de le semaine ». En s’attardant cette fois sur les catastrophes « naturelles » du moment, dont on rappellera qu’elles ne peuvent être directement reliées au réchauffement climatique, mais qu’elles le sont absolument, indirectement, ce qui se traduit par la fréquence accrue de leurs occurrences. Ainsi les masques chirurgicaux, utilisés durant la pandémie du Covid-19 ont-ils refait leur apparition dans le quotidien au Brésil. Cette fois, ce n’est pas pour se protéger d’un virus mais de la pollution émise par les feux de forêt qui dévastent le pays. Plus de 60 % du territoire, soit 5 millions de kilomètres carrés, est désormais recouvert par la fumée. Une nappe grisâtre, épaisse, visible depuis l’espace et âprement ressentie au sol. Ces derniers jours, à Porto Velho, en Amazonie, le taux de particules fines (PM2,5) a dépassé 339 microgrammes par mètre cube, soit 68 fois la limite recommandée par l’Organisation mondiale de la santé sur une année. De son côté, Sao Paulo, la plus grande agglomération d’Amérique du Sud, est, depuis lundi 9 septembre, la détentrice du titre peu enviable de la « ville la plus polluée au monde ». Il lui a été décerné par la société suisse IQAir, qui observe la qualité de l’air dans plus de cent grandes métropoles. Pas un quartier, pas une banlieue n’échappent à ce couvert insalubre, constate Le Monde. Ce qui a inspiré à Libération cette « Une » bien trouvée, comme souvent :
Autre catastrophe d’ampleur, plus proche de nous, la « tempête Boris » [NDLR : rien à voir avec l’auteur de ces lignes, réputé calme ] déroule ses effets et ravage l’Europe Centrale, pour reprendre les mots des Echos. Depuis la semaine dernière, des vents violents, précipitations exceptionnellement fortes et inondations ont fait 24 morts en République tchèque (5), en Autriche (5), en Pologne (7) et en Roumanie (7). À certains endroits, l’eau a « littéralement tout détruit », laissant le paysage dévasté « comme après une guerre », a déclaré à la presse hier le ministre polonais des Infrastructures, cité dans Le Parisien. Si la pluie a cessé de tomber dans une grande partie de la région, les rivières en crue menacent toujours des villes et localités en aval des cours d’eau. Au point que l’Union Européenne se mobilise. « À première vue, il est possible de mobiliser 10 milliards d’euros du Fonds de cohésion pour les pays touchés. Il s’agit d’une réaction d’urgence », a déclaré la Présidente de la Commission européenne, toujours Ursula, après une réunion avec les chefs de gouvernement polonais, tchèque, autrichien et slovaque. « Il était pour moi (…) déchirant de voir la destruction et la dévastation » entraînées par les inondations, a-t-elle ajouté.
Et la France, dans tout cela ? Elle ne sera bien sûr pas épargnée, notamment en ce qui concerne les feux de forêts. Selon la dernière étude de l’INRAE, on a même une idée assez précise de ce qu’il adviendra d’ici 2090, soit des incendies deux à trois fois plus nombreux, ainsi que l’illustre parfaitement cette infographie, publiée dans Libération :
Et pour terminer en beauté cette séquence climat, le journal La Croix s’est fait l’écho d’un nouveau « record du monde », celui des émissions de méthane. C’est le constat d’une étude de l’organisation Global Carbon Project publiée mardi 10 septembre dans la revue scientifique Environmental Research Letters. Le constat est d’autant plus inquiétant que le pouvoir de réchauffement du méthane est plus de 80 fois plus important sur vingt ans que celui du CO2. Sa durée de vie dans l’atmosphère étant largement plus courte (une dizaine d’années contre entre 300 et 1 000 ans pour le dioxyde de carbone), cela en fait un enjeu important dans la lutte contre le réchauffement climatique. Dans les années 2010, le méthane avait déjà contribué à une hausse de la température mondiale d’environ 0,5 °C par rapport à la fin des années 1980. Et ses taux dans l’atmosphère ne cessent de grimper. « Le méthane augmente plus rapidement que tout autre gaz à effet de serre majeur et est aujourd’hui 2,6 fois plus élevé qu’à l’époque préindustrielle », s’alarme l’étude. En 2020, les activités humaines ont émis 400 millions de tonnes de méthane, un record. Mais ces émissions ont continué d’augmenter « jusqu’en 2023 au moins ». Une situation qui « ne peut plus durer si nous voulons maintenir un climat habitable », alertent les scientifiques du Global Carbon Project. Pour rappel, à l’occasion de la COP26, organisée à Glasgow en 2021, plus de 100 États avaient rejoint le « pacte global pour le méthane » et s’étaient engagés à réduire leurs émissions d’au moins 30 % d’ici à 2030 par rapport aux niveaux de 2020. Mais la croissance observée des rejets de méthane suit actuellement les scénarios les plus pessimistes. Les objectifs de réductions « semblent aussi lointains qu’une oasis dans le désert », juge Rob Jackson, chercheur à l’université de Stanford et auteur principal de l’étude. « Nous espérons tous qu’ils ne sont pas un mirage, conclue-t-il ».
Ce qui nous amène directement au « Oh shit moment » de la semaine, présenté par ces mots dans Le Monde, qui nous vient de la lecture d’une étude consacrée à l’efficacité -ou non- des politiques climatiques. Cette expression imagée, conceptualisée par le philosophe australien Clive Hamilton, décrit « l’instant où tout apparaît inutile et dérisoire face à un réchauffement climatique inéluctable. Une sorte de cristallisation de l’effroi », écrit joliment Le Monde. La lecture d’une étude publiée dans la revue Science le 22 août ne va pas soigner les angoisses des plus désespérés. Des scientifiques de l’Institut de recherche de Potsdam ont puisé dans les données de l’OCDE pour analyser les effets de 1 500 politiques climatiques mises en place dans 41 pays entre 1998 et 2022. Grâce à une machine d’intelligence artificielle, ils ont estimé leurs conséquences sur la baisse des émissions de CO2. Le résultat est « affligeant ». Dans le détail, ils ont identifié seulement 63 mesures efficaces qui ont entraîné des baisses d’émissions d’au moins 4,5 % à 13 % dans différents secteurs. La plupart des améliorations se produisent dans le bâtiment (24 cas), suivi par les transports (19 cas), l’industrie (16 cas) et l’électricité (10 cas). Soixante-trois sur 1 500, autrement dit 4,2% ? « Oh, shit… », serait-on tenté de penser. Et pourtant, au milieu des graphiques très sombres, ce travail recèle des clés pour améliorer les politiques publiques. Ainsi, 70 % des mesures utiles l’ont été lorsqu’elles étaient combinées à une ou plusieurs autres initiatives. En 2013, en Chine, la mise en place d’un système d’échange de droits d’émission dans l’industrie n’a eu que peu d’effets. Mais en 2016, les émissions ont franchement baissé quand ce système a été couplé à un renforcement des mécanismes de financement des investissements liés à l’efficacité énergétique puis à une baisse des subventions des combustibles fossiles. Autre exemple, au Royaume-Uni, l’inflexion des émissions dans le secteur électrique en 2015 et 2016 a été provoquée par l’introduction, à la mi-2013, d’un prix plancher du carbone, qui imposait un prix minimum aux producteurs d’électricité britanniques. Cette mesure a renforcé le système d’échange de quotas d’émission de l’Union européenne.
Le secteur de la semaine, qui devient une rubrique à part entière tant son actualité va croissante, est l’automobile – électrique, bien sûr. Le Monde se fait volontiers accusateur quant aux responsabilités des défaillances des entreprises européennes : « ce n’est pas la transition vers le véhicule électrique qui est à l’origine des difficultés de l’industrie mais la façon dont elle a été menée ». En cause : le choix de concevoir et proposer des véhicules luxueux et chers, à l’inverse de la démarche chinoise, qui propose des véhicules bas ou moyen de gamme relativement peu onéreux. Deuxième erreur : compter sur les seules importations, de matériaux comme de logiciels, ou la création ex-nihilo de petites parties de la chaîne, au lieu d’essayer de mettre en place une chaîne de valeur complète. Troisième erreur selon l’éditorialiste du Monde : mettre en place des droits de douanes peut-être insuffisamment dissuasifs pour les exportateurs chinois mais suffisamment perturbants pour les marques européennes ayant délocalisé leur production partiellement en Chine, comme Renault ou Volkswagen ! Dans la foulée, Le Monde a publié un reportage édifiant sur CATL, entreprise chinoise peu connue, installée à Ningde – ville de troisième rang dépourvue d’aéroport – qui produit à elle seule 40% des batteries automobiles mondiales. Et pour en finir très provisoirement avec cette rubrique, on rappellera que c’est le 27 septembre, dans une semaine, qu’entrera en vigueur l’imposition de 100% de droits de douanes sur les voitures électriques chinoises… aux Etats-Unis. Le Monde rappelle que sont également concernées les batteries de véhicules électriques et les cellules de panneaux solaires, qui seront respectivement taxées à 25 et à 50 %. Pour les semi-conducteurs, ça sera 50 %, à partir du 1er janvier 2025. La guerre fait donc rage.
Comme en écho au sujet précédent, l’épais rapport de la semaine est celui de Mario Draghi, ancien Président de la Banque Centrale Européenne, un Monsieur très sérieux. Ce rapport, consacré à la compétitivité européenne et aux moyens de l’améliorer, fait d’autant plus de vagues qu’il peut être interprété de façons diverses, selon que l’on s’intéresse à l’un ou l’autre de ses chapitres. Si le constat, « une crise existentielle », est largement partagé, les recommandations du rapport sont pour certaines sans doute plus discutables. Le constat, d’abord : si l’Union Européenne ne veut pas connaître « une lente agonie », ce sont « 800 milliards d’euros d’investissements supplémentaires par an » dont elle a besoin si elle veut pouvoir financer les réformes nécessaires afin d’éviter qu’elle ne se laisse distancer définitivement par les États-Unis et la Chine. Un bond significatif qui représenterait 5 % du PIB européen actuel, souligne Le Figaro . « À titre de comparaison, détaille Draghi dans son rapport, les investissements réalisés dans le cadre du plan Marshall entre 1948 et 1951 équivalaient à 1 à 2 % du PIB de l’UE ». A défaut, « nous ne pourrons pas devenir, à la fois, un leader dans les nouvelles technologies, un phare de la responsabilité climatique et un acteur indépendant sur la scène mondiale. Nous ne pourrons pas financer notre modèle social. Nous devrons revoir à la baisse certaines de nos ambitions, si ce n’est toutes », écrit Draghi. Et il en appelle à la responsabilité des États membres, afin de réellement donner à l’Union les moyens de ses ambitions. Mais comment faire ? Là, les solutions préconisées ne font pas l’unanimité. Ainsi, Mario Draghi préconise un vaste emprunt européen pour trouver les ressources nécessaires. Mais les esprits chagrins notent que le précédent, décidé au moment de la crise du COVID et doté de plus 800 milliards d’euros, est loin d’avoir été intégralement dépensé : les ressources existent, elles ne sont pas suffisamment employées. La Cour des comptes européenne vient de révéler, nous rappelle l’éditorialiste des Echos, que fin 2023, les pays de l’UE avaient utilisé moins d’un tiers des fonds prévus par le plan précédent… Au point que selon L’Express, le « Plan Draghi » serait déjà mort-né. Dans le même esprit, la Présidente de la Commission Européenne n’est pas convaincue non plus, qui a répondu (en substance) à Mario Draghi : « Consommez déjà l’argent disponible du précédent grand emprunt, celui lancé en février 2021 au lendemain de la première vague de Covid ».
Autre critique possible entendue contre le rapport Draghi : ses recommandations visant à alléger certaines des réglementations environnementales jugées trop contraignantes pour les entreprises. Et en particulier la CSRD et la CSDDD (prévue pour 2027), c’est-à-dire l’application d’un vrai devoir de vigilance pour les entreprises. Pour vous faire votre propre idée et si vous avez un peu de temps libre , le rapport peut être téléchargé ici.
La ferme solaire de la semaine est la plus grande du monde. Elle verra le jour en 2030. SunCable, voilà le nom du projet d’énergie renouvelable pharamineux lancé par l’Australie. Le 21 août dernier, Tanya Plibersek, ministre de l’Environnement, a officiellement approuvé les plans de cette centrale solaire dont la construction devrait coûter près de 21 milliards d’euros. Etalé sur 12 000 hectares au nord du pays, le site doit permettre d’alimenter trois millions de foyers à partir de 2030. Mais cette énergie ne sera pas seulement réservée à l’Australie : un câble reliant Singapour devrait fournir à terme 15% des besoins de la cité-Etat. Qualifié de “plus grande zone solaire du monde”, SunCable pourrait permettre à l’Australie de devenir “le leader mondial de l’énergie verte” espère Tanya Plibersek, citée par Novethic. Un objectif ambitieux. Fin août, la part du charbon, dont le pays reste l’un des principaux exportateurs mondiaux, est passé pour la première fois sous le seuil des 50% de la production nationale d’électricité.
La « Success Story » de la semaine – car oui, tout n’est pas sombre dans le monde compliqué de la transition ! – est celle de Dunkerque. Pascal Canfin, député européen, en parle très bien sur sa page LinkedIn : « Sur ce territoire, 20 000 créations d’emplois en 10 ans grâce à l’ouverture de 4 gigafactories pour la production de batteries de voitures électriques et d’usines pour leur recyclage et des projets industriels de décarbonation avec l’usine de ciment décarboné d’Ecocem et celle d’acier d’Arcelor Mittal. Dunkerque, c’est aussi un modèle innovant de planification territoriale de la transition écologique opéré par le Groupement d’Intérêt Public, Écosystème D, qui réunit les principaux acteurs publics et privés (Communauté Urbaine de Dunkerque, le Grand Port Maritime de Dunkerque, la CCI Littoral Hauts-de-Frances, la Communauté de Communes des Hauts de Flandre, les entreprises locales, les investisseurs, les établissements d’enseignement, etc.) dans le but de coordonner et accompagner les projets de développement du territoire. Et comme le rappelle Pascal Canfin, tout cela « n’aurait pas été possible sans le Pacte Vert européen qui fixe l’objectif d’atteindre la neutralité climatique d’ici 2050 au plus tard ! »
Notre Focus REP de la semaine n’en est pas une, mais plutôt une instance pour les réguler toutes (« one to rule them all » …) ! Rédigé par l’Inspection générale de l’environnement et du développement durable (IGEDD), l’Inspection générale des finances (IGF) et le Conseil général de l’économie, de l’énergie et des technologies (CGE), le rapport intitulé « Performances et gouvernance des filières à responsabilité élargie du producteur (REP) », commandé par Élisabeth Borne lorsqu’elle était encore Première ministre, pointe, selon L’Usine Nouvelle, des insuffisances et des dysfonctionnements dans le modèle. Mais aussi des valeurs et des vertus. Les REP d’hier ne pouvant être celles d’aujourd’hui, « le statu quo n’est pas envisageable », les auteurs appellent à « une réforme institutionnelle » des filières soumises au principe de la REP, Voici les 10 propositions principales du rapport, telles que résumées par L’Usine Nouvelle :
Proposition n°1 [Gouvernement] : Créer une instance de régulation des filières REP, afin de regrouper et d’exercer de manière indépendante les fonctions de régulation des équilibres concurrentiels, de gestion des différends, de contrôle et de sanction. Conforter la DGPR, en lien avec la DGE, dans un rôle de définition du cadre et des objectifs de la politique publique de la REP et, plus largement, de l’économie circulaire.
Proposition n°2 [Instance de régulation] : Collecter, fiabiliser et actualiser régulièrement les données sur lesquelles doit être assis le pilotage des filières REP.
Proposition n°3 [DGPR, en lien avec DGE] : Au niveau des filières, transformer les cahiers des charges en lignes directrices, fixant des objectifs de moyen terme crédibles associés à des indicateurs pertinents, revues tous les quatre ans. En évaluer les impacts environnementaux et économiques.
Proposition n°4 [Instance de régulation] : Au niveau des éco-organismes et des systèmes individuels, délivrer des agréments sans limite temporelle. Mettre en place un mécanisme de suivi de leur performance plus étroit et régulier, fondé sur un cadre d’objectifs quadriennal déclinant les lignes directrices de filière à l’échelle de chaque éco-organisme ou système individuel.
Proposition n°5 [Instance de régulation] : Confier à l’instance de régulation un dispositif de réponse adapté, rapide et dissuasif (panel d’outils incluant mise en demeure, injonction, consignation, sanctions…) en cas de constat d’écart à la cible. La rendre destinataire des projets de budget des éco-organismes et systèmes individuels et lui permettre de formuler des observations.
Proposition n°6 [Instance de régulation, en lien avec les éco-organismes] : Développer les capacités d’identification des metteurs en marché qui ne sont pas en conformité avec leur obligation de paiement d’une éco-contribution. Confier à l’instance de régulation la responsabilité (i) d’appliquer les sanctions prévues au II de l’article L. 541-10 du code de l’environnement et (ii) de rendre visible sur un site internet la liste des metteurs en marché contrevenants.
Proposition n°7 [Instance de régulation] : Mieux inciter les collectivités à la performance (i) en différenciant, dans les contrats-types des filières concernées, les niveaux de soutien aux collectivités selon les coûts moyens de collecte et de traitement des déchets par catégorie de territoire et (ii) en publiant les niveaux de performance de chaque collectivité sur les principaux flux matière.
Proposition n°8 [DGPR, DGE] : En complément de la modulation des éco-contributions, s’appuyer davantage sur le levier règlementaire harmonisé à l’échelon européen, pour renforcer les exigences envers les metteurs en marché relatives à l’éco-conception, l’allongement de la durée de vie des produits, et l’incorporation de matières recyclées.
Proposition n°9 [DGPR] : Confier à l’Ademe la mise en œuvre des fonds de réemploi/réutilisation et de réparation, en lieu et place des éco-organismes, leur gouvernance entrant en conflit d’intérêts avec ces missions.
Proposition n°10 [Gouvernement] : Ne créer de nouvelle filière REP que si elle correspond à une exigence européenne.
Osons l’écrire, chez (RE)SET, on retrouve là nombre de nos propres préconisations…
Le Nutri-Score de la semaine est celui de Danone, l’un des promoteurs historiques du système, qui vient pourtant de décider de ne le conserver que sur ses produits dont les résultats lui plaisent… En cause : une mise à jour des critères qui pénalise les teneurs en sucre trop élevées et fait donc chuter le classement de certains produits phares de Danone, dont Actimel, Activia et autre Danonino. Résultat : un Nutri-Score à la carte… mais alors à quoi bon ? Selon L’Express, qui s’en émeut, il serait donc « urgent de rendre le Nutri-Score obligatoire », la bonne volonté des acteurs privés « ayant prouvé ses limites ».
L’infographie de la semaine pourrait s’intituler « petites causes, grands effets » (on ironise). Elle traduit l’impact du réchauffement climatique sur nos grands crus et parle d’elle-même, c’est The Conversation qui nous l’offre. Il nous faut donc plus que jamais « consommer avec modération » !
L’idée « parents » de la semaine concerne votre ado ou post-ado potentiellement désœuvré . S’il passe son temps allongé sur un canapé et plongé dans des jeux vidéo, suggérez-lui de s’inscrire au « service civique écologique » ! L’Agence du service civique, l’Agence publique de la transition écologique (Ademe) et l’association Unis-Cité ont lancé « le recrutement de 1 000 » jeunes en service civique, des ambassadeurs « justement chargés » d’inciter d’autres personnes à s’engager, rapporte Les Échos. Au total, Le gouvernement vise le recrutement de 50 000 jeunes pour accomplir un service civique en lien avec l’environnement d’ici 2027. Pour rappel, ce service est destiné à tous les jeunes de 16 à 25 ans, le seuil maximal étant fixé à 30 ans pour ceux en situation de handicap. La possibilité d’accomplir un service civique écologique est ouverte quelle que soit votre statut (étudiant, chômeur, salarié, etc.). Aucune condition de diplôme ou d’expérience antérieure n’est exigée. Petite précision : ce service n’est pas bénévole mais payé.
Côté biodiversité, l’étude de la semaine compte les poissons…et le compte n’y est pas ! « Compter le nombre de poissons dans l’océan n’est pas une mince affaire », note finement La Croix. C’est même un exercice diablement compliqué, mais essentiel : évaluer les populations de poissons permet de savoir combien il est possible d’en pêcher sans mettre en danger les stocks. C’est la base des quotas qui sont mis en place pour préserver la ressource halieutique. Sauf que selon une étude publiée le 22 août dans la revue Science, les modèles utilisés surestimeraient souvent les effectifs des populations de poissons. En moyenne, les stocks de poissons seraient surestimés de 11,5 %, avec de fortes disparités selon les populations cependant. De fait, ce sont les populations vulnérables – concernées par la surpêche, le réchauffement de l’eau ou qui sont moins nombreuses – qui seraient systématiquement surévaluées. Les modèles peuvent aussi indiquer à tort que les effectifs d’un stock sont en hausse. « Plus une population est appauvrie, plus le biais est prononcé. Elle est doublement en danger, puisqu’on peut augmenter les captures au moment où il faudrait des mesures de conservation », alerte Christopher Brown, l’un des auteurs de l’étude. Selon l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), la part des stocks pêchés durablement dans le monde serait descendue de 90 % en 1974 à 64 % en 2019. Des chiffres qui seraient fortement sous-estimés : selon l’étude, un tiers de ces populations jugées durables au niveau mondial seraient en réalité en situation de surpêche. Les auteurs de la publication invitent donc à déterminer les quotas de pêche avec plus de précaution.
Biodiversité toujours, nos animaux domestiques comptent un nouveau défenseur et non des moindres. Bon, dans le contexte d’une Breaking (RE)NEWS par trop marquée par les « Oh shit moments », on peut aussi tenter une blague de la semaine . Pour celles et ceux qui ne comprendraient pas d’où sortent ces « images générées par IA », on suggère de visionner le dernier débat Trump/Kamala !
Notre précédente édition était ponctuée, à titre exceptionnel, de deux devinettes, l’une facile, l’autre moins. La facile d’abord, qui avait un lien avec les Jeux. Pourquoi l’entreprise Coca-Cola s’est-elle trouvée accusée de greenwashing -on a aussi parlé de sportwashing- en dépit de ses « eco-cups » « entièrement recyclables », comme dit la pub, utilisées durant les JO ? Pour une raison simple : chaque « eco-cup », avant d’être servie, était remplie par… des bouteilles en plastique. En quelque sorte, deux emballages jetables au lieu d’un : belle prouesse écologique, en effet .
La seconde devinette était plus coriace : que représente cette photo ? Simplement le portrait d’une dame allongée dans l’herbe (jusque-là pas de surprise !) … entourée de ses vrais déchets personnels de la semaine. Le résultat du travail du photographe Greg Segall et de son projet « 7 jours de déchets » : des photos d’amis et d’étrangers allongés dans une semaine de leurs véritables déchets. Rappelez-vous de votre semaine et imaginez à quoi ressemblerait votre photo à vous
La devinette de cette semaine devrait être simple : il s’agit d’une cartographie inédite, légendée, des cours d’eau en France, selon leur statut. Mais quelle surprise principale révèle-t-elle… ?
Bonnes lectures et bon week-end !
[Pour rappel, (RE)SET, fondé en 2019, est le premier cabinet de conseil indépendant dédié à la transition économique et environnementale et taillé pour l’action. « (RE)SET : resources to win environmental and economic battles ! » Forcément partielle, parfois partiale, toujours engagée, cette revue des médias au ton souvent enlevé, voire impertinent, n’engage aucunement (RE)SET et a fortiori moins encore Julhiet Sterwen dans ses activités de conseil mais elle brosse un portrait que nous estimons intéressant de l’état de la transition telle qu’elle transparaît dans la presse et les travaux de recherche. Une photographie du débat, des forces en présence, des oppositions, des convergences, que nous espérons utile à vos décisions et à la construction de vos stratégies de transition.]