Bonjour,
A défaut de fumée verte, une fumée blanche a déroulé ses volutes complexes au-dessus de l’Elysée : un Premier Ministre a été nommé, cela ne vous aura pas échappé. De même qu’il ne vous aura pas échappé non plus que le gouvernement ne sera pas nommé avant… au moins la prochaine Breaking (RE)NEWS ! En attendant, peut-on percevoir les premières implications de ces développements pour le sujet qui nous est cher, le seul qui vaille : la transition environnementale et économique ? La vraie réponse est non . Pas de composition du gouvernement, pas de certitude sur le non-vote d’une motion de censure, pas d’indication ferme sur le projet de loi de Finances 2025. Mais des indices sont là, souvent contradictoires et on vous en laissera juge, en adoptant deux visions radicalement opposées !
D’abord, faisons un rêve. Après tout, les vacances ne sont pas loin, le ciel est plutôt bleu, les bonnes résolutions de rentrée sont prises, bref, l’ambiance s’y prête ! Michel Barnier, un homme d’expérience, étant le plus vieux Premier Ministre succédant au plus jeune Premier Ministre de la Cinquième République, a des atouts dans sa manche, quand on parle transition. D’abord, il a été Ministre de l’Environnement (de 1993 à 1995) et à ce titre il a conçu la « loi Barnier » (2 février 1995). Ce n’est pas rien ! Car cette loi a érigé les principes généraux du droit de l’environnement : principe de précaution, principe de prévention et principe du pollueur-payeur. Lors de son passage à l’environnement, Michel Barnier a également contribué à la reconnaissance des risques naturels pour les biens et les personnes, à une fiscalité sur les espaces maritimes protégés et au débat sur l’écologie via la création de la Commission nationale du débat public (CNDP). Pour être complet, il faut mentionner aussi le « Fonds Barnier », que connaissent bien les victimes de catastrophes naturelles, et les collectivités territoriales, indemnisées via ce Fonds. De ce fait, même une ONG aussi féroce que Greenpeace reconnait « l’intérêt sincère » du nouveau Premier ministre « pour les problématiques environnementales ». Dans une interview accordée à La Revue des Deux Mondes en octobre 1993, Michel Barnier formulait un vœu : que le ministère de l’Environnement soit « respecté et associé ». Il souhaitait alors que « l’environnement cesse d’être un sujet de confrontation pour devenir un sujet de concertation ». Concrètement, le ministre souhaitait « supprimer les décharges d’ici à l’an 2002 », « réduire à zéro les effets des déversements toxiques [dans l’eau] d’ici à cinq ans » et « atteindre un taux de dépollution des villes de 70% à la fin de la décennie ». Des objectifs ambitieux mais… pas atteints, une constante dans notre domaine .
Plus tard, comme ministre de l’Agriculture, Michel Barnier est réputé avoir su résister aux pressions de la FNSEA, ce qui n’est pas mince non plus, comme le montre chaque tentative de réforme agricole. L’association Générations Futures dit ainsi « admettre que Michel Barnier en tant que ministre de l’Agriculture a su résister aux pressions, notamment celles de la FNSEA, durant les négociations du Grenelle sur les pesticides ». « Il a maintenu les objectifs de réduction des pesticides du Plan EcoPhyto […] À cette époque, il avait également ouvert son ministère aux associations environnementales, rompant ainsi avec la seule cogestion traditionnelle entre l’État et les syndicats agricoles dominants », écrit encore l’association. Or, c’est un sujet sur lequel le nouveau Premier ministre sera aussi attendu, le texte censé répondre à la colère agricole étant resté au milieu du gué en raison de la dissolution. La FNSEA et les Jeunes agriculteurs ont d’ailleurs rapidement appelé jeudi le nouveau Premier ministre à « placer l’agriculture dans les priorités immédiates de son gouvernement ».
Plus tard encore, ministre des Affaires Européennes, ministre des Affaires Etrangères et (deux fois) Commissaire Européen avant de devenir négociateur de l’UE pour le Brexit, Michel Barnier a démontré sa ténacité et sa capacité à mener à bien des discussions difficiles, sans parler de son expérience et de sa connaissance hors norme des arcanes communautaires. Toutes choses indispensables pour peser sur l’agenda bruxellois, dont on sait l’importance quant aux textes relatifs à la transition.
Donc, pourquoi ne pas rêver ?
Parce que le cauchemar reste possible ! Dans une vision moins optimiste, on peut choisir de mettre en avant un projet de loi de Finances 2025 dont on sait déjà qu’il suscitera de grandes tentations de rogner à nouveau sur les dépenses environnementales, surtout si l’on a besoin des votes, ou du moins de la non-censure, de la partie la plus à droite de l’échiquier politique. Dont l’on sait qu’elle est peu portée sur la transition environnementale et économique… Les marges de manœuvre du nouveau Premier Ministre, on le pressent, seront étroites.
Rêve ou cauchemar, la suite dans la prochaine Breaking (RE)NEWS !
Pendant ce temps-là, l’urgence environnementale est toujours plus intense et les efforts comme les reculs liés à la transition continuent de s’égrener, comme en attestent nos rubriques habituelles. A commencer par la « météo de le semaine », ou plutôt de l’été. En effet, rappellent Les Echos, « l’été 2024 a été le plus chaud jamais enregistré sur la planète ». Voilà, les mois passent et rien ne change : depuis deux ans, les records sont dépassés chaque mois ou presque. De juin à août, la température moyenne mondiale a été la plus élevée jamais mesurée, battant le record de 2023, a annoncé l’observatoire européen Copernicus. « Cette série de records augmente la probabilité que 2024 soit l’année la plus chaude jamais enregistrée », là aussi devant 2023, s’alarme Samantha Burgess, cheffe adjointe du service changement climatique (C3S) de Copernicus, dans son bulletin mensuel. Et depuis le début de l’année, les 1,5 degrés supplémentaires à la moyenne de la période préindustrielle (1850-1900) – l’objectif ambitieux des Accords de Paris- sont d’ores et déjà dépassés.
Le Monde apporte une précision importante : « La chaleur inédite de l’été s’explique essentiellement en raison de la température à la surface des océans, qui reste à des niveaux records dans la majorité des bassins ». Si comme nombre de vacanciers vous avez eu l’occasion de tremper votre orteil en août dans la Méditerranée, vous n’avez pu que le constater : la température de l’eau approche celle que l’on a plus l’habitude de rencontrer aux Caraïbes ! Et de fait, « une fois de plus, la Méditerranée est en surchauffe ». La vague de chaleur marine dans la mer de Ligurie a atteint des niveaux record. Mi-août, selon les données satellitaires, la température était supérieure de 5 degrés par rapport à la période de référence (la moyenne des températures mesurées entre 1991 et 2020) dans la zone située entre Nice, la Corse et le golfe de Gênes, en Italie. »
« Le réchauffement des mers et des océans, qui absorbent environ 90 % des émissions de gaz à effet de serre, est directement lié au réchauffement de la planète provoqué par les activités humaines, notamment par la combustion d’énergies fossiles (pétrole, gaz et charbon) », indique Le Monde. Pour conclure, affirme l’ONU, l’humanité, qui émettait environ 57,4 milliards de tonnes d’équivalent CO2 en 2022, n’a pas encore commencé à réduire sa pollution carbone.
De quoi sérieusement alimenter les discussions durant le sommet annuel du Forum des îles du Pacifique (FIP), qui s’est tenu fin août, dans la capitale des Tonga, Nuku’alofa, alors que la région est confrontée à la hausse du niveau de l’océan. Libération était là. « Nous nous rassemblons à un moment crucial dans l’histoire de notre région […]. Nous sommes en première ligne de la bataille contre le changement climatique », a lancé le secrétaire général du FIP, Baron Waqa, de l’île de Nauru. Le ministre du Climat de l’archipel des Tuvalu, un petit Etat de basse altitude, Maina Talia, a quant à lui exhorté les « pays les plus pollueurs » (comprendre : les pays du Nord) à assumer financièrement les coûts croissants liés au changement climatique, estimant que « le principe du pollueur-payeur doit être mis sur la table ». Le FIP regroupe 18 Etats et territoires associés d’Océanie, dont, depuis 2016, la Nouvelle-Calédonie et la Polynésie française. Beaucoup de ses membres sont aujourd’hui menacés d’anéantissement pur et simple par la montée du niveau de l’océan due au réchauffement climatique. Un pays comme les Tuvalu, avec un point culminant de 4,6 mètres, pourrait ainsi disparaître d’ici trente ans. « Les décisions que les dirigeants du monde prendront dans les années à venir détermineront le sort, d’abord des insulaires du Pacifique, et ensuite du reste du monde, prédit le secrétaire général de l’ONU, António Guterres, invité au sommet. Si nous sauvons le Pacifique, nous sauvons le monde ». L’occasion de republier cette image qui avait fait le tour du monde, lors de la COP26 : le chef de la diplomatie de l’archipel des Tuvalu, Simon Kofe, avait marqué les esprits avec un discours enregistré dans la mer, de l’eau jusqu’aux genoux.
Autant dire qu’il est temps que le rythme de la transition s’accélère. Et cela tombe bien, il se passe des choses . Par exemple, « l’appel de la semaine » pourrait être celui lancé par 130 grandes entreprises, en amont de la COP 16 sur la biodiversité. Cette grande conférence des parties, qui se tiendra à Cali en Colombie, du 21 octobre au 1er novembre 2024, rappelle Novethic, réunira les Etats mondiaux pour continuer à élaborer un cadre d’action internationale pour la protection de la biodiversité. C’est en vue de cet événement planétaire qu’une coalition de près de 130 grandes entreprises vient de publier un appel pour promouvoir le rôle du secteur privé dans la protection de la biodiversité : « Nous comprenons qu’une planète saine est essentielle pour des entreprises résilientes », explique ainsi le communiqué de la coalition, qui plaide pour « un leadership immédiat pour renforcer – et non affaiblir – les politiques, les incitations et la législation qui conduiront à l’action des acteurs économiques nécessaire pour stopper et inverser la dégradation de la nature d’ici 2030. » Parmi les signataires, on trouve Nestlé, Decathlon, H&M, Kering, Ikea, Inditex (Zara), Suez, EDF ou encore le pétrolier Enel. « Nous devons transformer l’ambition en action » affirment ainsi les signataires, qui sans doute involontairement reconnaissent par là même que pour l’instant, si l’ambition déclarée est là, les actions ne le sont pas encore. La coalition propose notamment d’assurer une « utilisation et une gestion durables des ressources », en encourageant les entreprises à recourir à des solutions de compensation écologique, à l’agro-écologie ou à des techniques de l’économie régénérative. L’ « intégration de la nature dans les prises de décision » et les mesures visant à favoriser la transparence en matière de biodiversité sont également mises en avant. Enfin, l’appel met l’accent sur la nécessité de mobiliser la finance vers des solutions compatibles avec la protection de la biodiversité, à l’heure où les acteurs financiers peinent encore à intégrer la biodiversité dans leurs politiques d’investissement. Sur tous ces sujets, chez (RE)SET, c’est peu dire qu’on approuve. On a même des offres pour aider .
L’autre « appel de la semaine » nous vient d’un collectif de 65 acteurs de l’économie circulaire dont Eric Duverger, Benoît Hamon et Pierre-Emmanuel Saint-Esprit qui plaident, dans une tribune au Monde, pour la nomination d’un ministre chargé spécifiquement d’en généraliser les pratiques, qui font aujourd’hui consensus. Selon eux, « des entreprises et acteurs locaux font tous les jours la démonstration qu’il est possible de décorréler création de richesses et prédation de nos ressources naturelles ». Chez (RE)SET, on peut en témoigner
A titre de contre-exemple peut-être, le « déménagement de la semaine » est celui de Chevron, qui a claqué la porte de la Californie pour rejoindre le Texas. D’ici à la fin de l’année, la deuxième plus grande compagnie pétrolière des Etats-Unis va délocaliser son siège social à Houston, au Texas. Pour son directeur général, Mike Wirth, cité par Novethic, « Houston est la capitale mondiale de l’énergie. C’est un endroit naturel pour les entreprises de notre secteur d’y avoir leur siège social ». Pour couper court à toutes polémique, l’entreprise a expliqué que ce déménagement était motivé par une relocalisation de ses activités, et non pas pour des raisons politiques. Malgré la communication officielle de Chevron, beaucoup se demandent si la finalité exacte de cette « relocalisation » n’est pas d’échapper aux contrôles réglementaires. « Il est regrettable que les entreprises délocalisent leur main-d’œuvre dans des endroits où les réglementations environnementales sont moins strictes plutôt que de travailler de manière à créer des communautés saines et dynamiques », a fait remarquer au Los Angeles Times, Sarah Elkind, professeur à l’université d’Etat de San Diego. Et en réalité, Chevron ne fait que rejoindre la très longue liste des entreprises qui ont quitté la Californie au profit du Texas. Un mois auparavant, début juillet, Elon Musk a quant à lui annoncé son intention de déménager les sièges sociaux de X et de SpaceX à Austin en raison de la culture “woke” du Golden State. Mais d’autres sociétés, comme HP, Oracle Corp, Toyota Motor North America, Charles Schwab ou encore Tesla, ont déjà claqué la porte de la Californie.
Autre signe peu encourageant, le « retour en arrière de la semaine » concerne un Etat : la Suède. Vertueuse à bien des égards, la Suède développe depuis l’arrivée au pouvoir de la droite soutenue par l’extrême droite des tendances qui vont « à rebours de l’histoire », explique Libération. Le gouvernement a annoncé début septembre qu’il allait supprimer une taxe sur le transport aérien mise en place par la gauche en 2018, avec l’intention de réduire les effets du transport aérien sur le réchauffement climatique. Le gouvernement avait indiqué auparavant envisager de diviser cette taxe par deux. Il a finalement décidé de la supprimer au 1er juillet 2025. Sans surprise, les ONG de défense de l’environnement critiquent cette décision, jugeant qu’elle va entraîner une hausse des vols et donc des émissions de gaz à effet de serre. « C’est complètement à contre-courant, le gouvernement abandonne complètement la politique climatique », déplore Daniel Kihlberg, de la Société suédoise pour la conservation de la nature, auprès du journal Aftonbladet. En cause, notamment, les mesures annoncées lors de la présentation du budget 2024 dont l’allègement de la fiscalité sur les carburants, mais aussi le manque de mesures concrètes dans le « plan d’action climatique », une feuille de route quadriennale. Mais c’est en Suède, rien à voir avec la France, bien sûr
Le (mauvais) chiffre de la semaine est celui de l’amende que la France a payé à l’UE au titre de la « taxe plastique » en 2023 : 1,5 milliard d’euros. Cette année encore, le pays a dû régler 1,5 milliard d’euros à l’Union européenne au titre de la « taxe plastique », selon les données publiées par le Secrétariat général à la planification écologique (SGPE). Le montant des années précédentes se situait entre 1,2 et 1,3 milliard d’euros. Depuis le 1er janvier 2021, cette contribution nationale fait partie des nouvelles ressources propres de l’UE, créée initialement pour financer le Brexit, et aujourd’hui le plan de relance européen. Imposée à tous les Etats membres, cette taxe est calculée en fonction du volume de déchets d’emballages en plastique non recyclés produits en douze mois, sur la base de 800 euros la tonne. Cela concerne à la fois les déchets plastiques ménagers et non ménagers, du pot de yaourt à la coque des téléphones. La France est bien « l’un des plus mauvais élèves de l’Europe », constate Novethic. Malgré une hausse de 6% des quantités recyclées, seuls 23% des emballages plastiques le sont réellement dans l’Hexagone, contre un objectif fixé de 40%. Et nous sommes surtout loin derrière nos voisins européens avec plus de 50% d’emballages recyclés en Belgique ou en Espagne. La France s’est pourtant dotée de mesures pour limiter certains plastiques, via la loi Agec (anti-gaspillage pour une économie circulaire) entrée en vigueur en 2021. Elle prévoit notamment le recyclage de 100% des emballages en plastique à usage unique d’ici le 1er janvier 2025. En attendant, en 2023, la France est devenue le premier contributeur de l’UE au titre de la « taxe plastique » (encore appelée « ressource plastique » ou « ressource propre plastique »). Un record peu glorieux, juge le site déchets info.
A propos de pollution plastique, les « contrats de la semaine » sont ceux passés par l’entreprise française de biothechnologie Carbios. L’Usine Nouvelle nous révèle que le pionnier du recyclage enzymatique Carbios a profité de l’été pour s’affirmer sur la scène internationale. En effet, depuis le mois de juin, la société a signé pas moins de trois lettres d’intention pour l’installation d’unités de biorecyclage sous licence Carbios. La première a été signée avec la société Zhink, un fabricant chinois de PET et de textiles. Cette société envisage la construction d’une unité de dépolymérisation enzymatique des déchets PET d’une capacité annuelle de traitement de 50 000 tonnes de déchets en PET. Cet accord officialise une collaboration à long terme entre Zhink et Carbios et qui contribuerait à l’accélération d’une économie circulaire pour le plastique et le textile en Chine. « La Chine fait preuve d’une grande dynamique pour accélérer l’économie circulaire et atteindre son objectif de neutralité carbone d’ici à 2060. La technologie développée par Carbios prend tout son sens dans ce contexte : capable de recycler tous les types de déchets en PET, elle favorise l’économie circulaire avec des produits de haute qualité et réduit considérablement l’empreinte carbone des industries », a commenté Emmanuel Ladent, directeur général de Carbios. En août, ce sont deux autres lettres d’intention qui ont été signées : l’une avec Sasa et l’autre avec FCC Environment. Sasa, fabricant turc de polyester, de fibres, de fils, de filaments et de matière plastique à base de polyester, souhaite faire l’acquisition d’une licence Carbios pour la construction d’une unité de biorecyclage d’une capacité de traitement annuelle de 100 000 tonnes de déchets PET à Adana (Turquie). « En tant que principal producteur de polyester, il est de notre devoir d’ouvrir la voie en termes de durabilité et de responsabilité environnementale. Sasa doit faire partie du secteur du recyclage et notre partenariat avec Carbios renforce notre engagement en faveur de l’innovation pour faire progresser l’économie circulaire dans le domaine des textiles », a déclaré Kemal Öz, directeur général de Sasa. La lettre d’intention signée avec FCC Environment, l’une des principales sociétés de gestion des déchets en Angleterre, envisage l’acquisition d’une licence afin de construire une unité au Royaume-Uni. « Nous sommes impatients d’étudier avec Carbios la contribution que cette technologie pourrait apporter à l’économie circulaire du Royaume-Uni et d’examiner, à partir d’une base de données solide, quelle pourrait être sa place dans la hiérarchie des déchets du Royaume-Uni », a déclaré Steve Longdon, directeur général de FCC Environment UK. Cocorico ! Et Carbios n’est pas seul à proposer des solutions innovantes en la matière. Chez (RE)SET, nous avons aussi un autre poulain qui va faire du buzz, le moment venu !
Pollution toujours, de l’air cette fois, notre illustration de la semaine, que l’on serait tenté de qualifier de « rubrique Maxime Blondeau » en hommage au travail de sensibilisation remarquable effectué chaque semaine sur LinkedIn par ce « cosmographe, auteur et conférencier », met la France en plutôt bonne position :
Les particules appelées PM2.5 sont des particules dont le diamètre est de 2.5 micron (μm). Elles sont constituées d’un mélange chimique émis lors des phénomènes de combustion ou formées par réactions chimiques industrielles ou courantes. Ces particules fines sont responsables du décès prématuré de 5 millions d’européens depuis 20 ans, selon l’Agence Européenne de l’Environnement. Tout de même.
La ressource de la semaine dont l’Europe aura bientôt du mal à se fournir en quantité suffisante est l’antimoine. De fait, nous apprend L’Usine Nouvelle, la Chine a décidé de restreindre ses exportations de ce métal anti-feu critique dans la défense et le solaire. Pékin a annoncé jeudi 15 août son intention de restreindre ses exportations d’antimoine dès septembre. La Chine est le plus gros producteur de ce métal critique, utilisé dans différents secteurs de l’industrie pour ses propriétés de retardateur de flamme, ainsi que dans les munitions et le photovoltaïque. Son prix grimpait déjà en flèche ces derniers mois. En guerre commerciale dans les semi-conducteurs avec Washington, Pékin multiplie depuis un an ce type d’opérations, notamment concernant le gallium et le germanium, les technologies de traitements des terres rares, ainsi que certaines formes de graphite. Cette fois, les restrictions peuvent toucher non seulement des secteurs liés à la transition écologique, mais aussi un grand nombre d’autres industries. Ainsi, si l’antimoine est critique pour la production de panneaux solaires (où il sert à clarifier et à renforcer les vitres de protection des modules), il reste principalement utilisé sous forme de trioxyde d’antimoine, une poudre blanche qui sert de retardateur de flamme un peu partout, notamment dans la plasturgie mais aussi par exemple au sein du textile des sièges automobiles.
Ressource toujours, mais agricole celle-ci, l’aliment de la semaine est l’avocat. Pourquoi lui ? Car sa production a triplé en 20 ans, au niveau mondial, ce qui ne présente pas que des avantages. The Conversation nous apprend que « manger trop d’avocats est mauvais pour la planète » ! La popularité croissante de l’avocat au cours des dernières décennies s’explique en partie par le fait qu’il est considéré comme un « superaliment ». Bien que certaines allégations de santé aient pu être exagérées, l’avocat est en effet une bonne source de vitamines, minéraux et graisses insaturées, qui lui confèrent sa texture crémeuse et satisfaisante. Oui mais voilà : à l’instar d’une grande partie de l’agriculture moderne, la plupart des plantations d’avocats dépendent en fait beaucoup des engrais et des combustibles fossiles, ce qui contribue à l’augmentation des émissions de gaz à effet de serre. Les rendements sont aussi inférieurs à ceux de nombreuses autres cultures et l’empreinte carbone par kilogramme de fruit est donc plus élevée. En moyenne, les avocats ont une empreinte carbone d’environ 2,5 kg d’équivalent CO₂ (eq CO₂) par kg, donc plus de deux fois supérieure à celle des bananes (0,9 kg d’eq CO2 par kg) et plus de cinq fois supérieure à celle des pommes (0,4 kg d’eq CO2 par kg). Si comme l’auteur de ces lignes vous adorez l’avocat, pas d’inquiétude : tous ces chiffres restent faibles par rapport à l’empreinte carbone moyenne mondiale de la plupart des produits d’origine animale. Un kilogramme d’œufs a une empreinte carbone de 4,6 kg d’eq CO2, un kilogramme de poulet de 9,8 kg d’eq CO2 et un kilogramme de bœuf de 85 kg d’eq CO2 en moyenne. Donc mangez moins de bœuf et vous pourrez continuer à vous gaver d’avocats
En Corée du Sud, la psychose de la semaine concerne les voitures électriques, qui commencent à être interdites de parkings publics pour cause d’embrasements trop fréquents. Une série d’incendies impliquant des voitures électriques a mis le feu aux poudres depuis un mois. Le plus grave, raconte L’Usine Nouvelle, s’est produit le 1er août dans un parking souterrain à Incheon, en banlieue de Séoul : 140 véhicules ont été réduits en cendres et une grande partie du bâtiment endommagé. En cause, une Mercedes-Benz dont la batterie a soudainement pris feu. L’enquête a déterminé que cette dernière était de manufacture chinoise, conçue par l’entreprise Farasis. Bien que les accidents restent rares dans l’absolu, les Sud-Coréens s’inquiètent des risques associés à l’utilisation de véhicules à batterie. D’autant plus que le souvenir de l’incendie de l’usine Aricell au mois de juin ayant causé 23 morts est encore vif dans les esprits. Les parkings de la capitale commencent donc à interdire l’accès aux voitures électriques et les bornes de recharge sont déplacées à l’extérieur des souterrains. Sur les sites de ventes de véhicules d’occasion, le nombre de voitures électriques listées a bondi de 184% en une semaine, à mesure que les propriétaires souhaitent se séparer de leurs véhicules.
Voitures électriques toujours, la guérilla de la semaine oppose toujours la Chine à l’UE, avec de nouveaux rebondissements dans la saga des droits de douane, racontés par Le Monde : la Commission européenne a publié fin août le montant des taxes, légèrement révisé à la baisse, mais allant jusqu’à 36,3 %, qu’elle entend appliquer à l’importation de certaines catégories de ces véhicules. Cette décision a été prise au terme d’une enquête conduite par Bruxelles sur les subventions attribuées par Pékin à l’industrie automobile chinoise, pour parer à une concurrence déloyale avec les constructeurs européens. La réaction chinoise ne s’est pas fait attendre. En guise de représailles, la Chine a annoncé l’ouverture d’une enquête sur les pratiques commerciales de certains produits laitiers, notamment du fromage et certains laits et crèmes, exportés par l’Union européenne (UE). Pékin a déjà ouvert en janvier, en réaction à de précédentes annonces européennes, des enquêtes sur le cognac français et certains produits de viande de porc, et déposé une plainte auprès de l’Organisation mondiale du commerce (OMC). Bien que l’agriculture européenne soit massivement subventionnée, Bruxelles affirme être en règle avec l’OMC. Interminable, le feuilleton euro-chinois des véhicules électriques devrait se prolonger encore quelques mois. L’entrée en vigueur des droits de douane décidés par la Commission est prévue pour fin octobre et requiert l’approbation de la majorité qualifiée des Etats membres de l’UE. Mais la porte n’est pas fermée. Pour éviter une guerre commerciale, Bruxelles a fait savoir que des discussions « intenses » sont en cours avec Pékin, afin de tenter de trouver « une solution alternative ».
La précision terminologique de la semaine concerne un mot souvent employé par les défenseurs de l’environnement, dont il s’avère qu’il a effectivement une portée pédagogique utile, mais qu’il est scientifiquement déplacé : l’anthropocène. The Conversation nous explique tout cela. Il aurait pu être consacré comme nouvelle époque géologique où l’influence de notre espèce surpasse les forces géologiques naturelles. Mais en mars dernier, les hautes instances de la géologie en ont décidé autrement. Faut-il comprendre que l’anthropocène est désormais mort et enterré ? Pas si sûr… Même mort, il bouge encore : le rejet de cette terminologie ne nie pas les dynamiques mises en lumière par le mot, comme le dépassement des limites planétaires. Époque géologique ou non, l’anthropocène a encore beaucoup à nous apprendre, notamment en sciences humaines, en nous obligeant à penser la complexité du monde. Mais pour ceux qui voudraient comprendre pourquoi l’anthropocène pose problème aux géologues, il faut revenir sur les arguments de ces derniers. Pour eux, le concept relève d’une forme d’anthropocentrisme, alors que l’histoire de notre espèce ne représente qu’un clin d’œil à l’échelle de celle de la planète. Ce qui n’empêche pas, pour autant, de le considérer comme un événement majeur du fait de l’impact des activités humaines… Mais pas comme une période géologique.
La devinette de notre précédente édition était une photo magique – et l’IA n’y est pour rien ! Il s’agissait bien sûr, représenté sur cette image déjà devenue culte, du surfeur brésilien Gabriel Medina, littéralement en lévitation après s’être qualifié pour les quarts de finale du surf aux Jeux de Paris.
La devinette de cette semaine a également un lien avec les Jeux. Pourquoi Coca-Cola est-il accusé de greenwashing -on a aussi parlé de sportwashing- en dépit de ses « eco-cups » « entièrement recyclables », comme dit la pub, utilisés durant les JO ?
Et comme celle-ci était un peu facile, voici à titre exceptionnel une seconde devinette de la semaine, peut-être plus coriace : de quoi s’agit-il ?
Bonnes lectures, bon week-end et bonnes reprises !
[Pour rappel, (RE)SET, fondé en 2019, est le premier cabinet de conseil indépendant dédié à la transition économique et environnementale et taillé pour l’action. « (RE)SET : resources to win environmental and economic battles ! » Forcément partielle, parfois partiale, toujours engagée, cette revue des médias au ton souvent enlevé, voire impertinent, n’engage aucunement (RE)SET et a fortiori moins encore Julhiet Sterwen dans ses activités de conseil mais elle brosse un portrait que nous estimons intéressant de l’état de la transition telle qu’elle transparaît dans la presse et les travaux de recherche. Une photographie du débat, des forces en présence, des oppositions, des convergences, que nous espérons utile à vos décisions et à la construction de vos stratégies de transition.]