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BREAKING (RE)NEWS DU 16 FÉVRIER 2024 : LA COP 14 EXISTE !

Les vacances scolaires sont là et la couverture médiatique de la transition économique et environnementale s’en ressent un peu. L’occasion est bonne pour lever le nez du guidon et se transporter dans quelques mois. Au 6-9 juin, pour être précis. Ces jours-là, comme tous les cinq ans, les citoyens des 27 pays membres de l’Union Européenne se rendront aux urnes pour élire leur Parlement. Bon, pas tous, certes, mais 68 % d’entre eux, soit 9 % de plus qu’en 2019, s’il faut en croire le dernier sondage européen sur la question. C’est une bonne nouvelle : l’UE, force motrice de la transition depuis 5 ans s’il en est une, intéresse. Mais, mauvaise nouvelle, la transition, désormais assimilée à tort au pouvoir d’achat est devenue partisane, enjeu ou otage de débats qui ne devraient pas la concerner. Toutes les enquêtes montrent un glissement marqué de l’électorat vers des partis politiques extrémistes ou nationalistes peu portés vers une accélération de cette transition. Voire en faveur d’un recul et d’un « détricotage » du Green Deal. Comme si le réchauffement climatique, la révolution des ressources et la transition qui permettra de relever ces défis devaient avoir une couleur politique…

Cette forte croissance de la droite extrême et des nationalistes risque de se faire aux dépens des Verts, des libéraux et des partis de gauche, comme le montrent ces illustrations, tirées de synthèses des différents sondages, repris notamment par Euractiv :

Si ces intentions de vote devaient se matérialiser dans moins de quatre mois, quelles pourraient en être les conséquences pour les politiques « vertes » de l’Union européenne ? L’UE en a eu un avant-goût lorsque les eurodéputés ont débattu à propos de l’objectif climatique recommandé par la Commission européenne pour 2040, à savoir une réduction de 90 % des émissions de gaz à effet de serre par rapport aux niveaux de 1990. Les groupes conservateurs et d’extrême droite ont mis en garde contre les conséquences sociales et le risque de désindustrialisation associés à des objectifs climatiques ambitieux. Le groupe nationaliste des Conservateurs et réformistes européens (CRE), qui pourrait dépasser Renew (parti où siègent les macronistes) en tant que 4e force politique au Parlement, s’est exprimée avec force : « Avez-vous dit aux agriculteurs et à la population que l’énergie, le transport, le logement, la viande et d’autres denrées alimentaires de base seront plus chers ? ». L’extrême droite était plus claire encore : il faut « abolir le Green Deal » ! Si l’on y ajoute le Parti Populaire Européen (PPE, conservateur), à l’origine de la « pause » des six derniers mois dans la législation environnementale européenne et qui devrait rester la première force politique de l’UE, on obtient une large majorité. De quoi donner des sueurs froides à Pascal Canfin, Président de la commission de l’Environnement, de la Santé Publique et de la Sécurité Alimentaire, qui contre-attaque en critiquant « vertement » le bilan européen du Rassemblement national, le qualifiant « d’idiot utile du Qatar, de l’Arabie saoudite et de l’Algérie » en faisant référence à un amendement de Jordan Bardella sur la COP 28 demandant la suppression de la mention : « Diminuer notre dépendance au pétrole ».

En attendant, on sent bien que la transition n’a plus le vent en poupe à Strasbourg, ni à Bruxelles, ni à… Berlin. Ainsi des aléas politiques imprévus auxquels se trouve confrontée la C3D, appellation simplifiée de la directive européenne sur le devoir de vigilance des entreprises en matière de durabilité (Corporate Sustainability Due Diligence Directive, CSDDD). Vendredi dernier, l’accord trouvé en trilogue entre les représentants du Parlement européen, du Conseil de l’UE et de la Commission européenne devait recevoir, comme une formalité, le vote favorable des membres des gouvernements siégeant au Comité des représentants permanents du Conseil de l’UE. « Eh bien non… », faute notamment à un revirement de l’Allemagne, dénoncent les juristes Stéphane Brabant, Céline da Graça Pires et Daniel Schönfelder, dans une tribune publiée par Le Monde, qui appellent l’Europe à se ressaisir quand un nouveau vote interviendra, peut-être la semaine prochaine. De fait, affirment-ils, « la CSDDD est un pilier pour la transition vers une économie durable en Europe. Elle incite les entreprises à intégrer la durabilité au cœur de leurs stratégies et de leurs actions, contribuant ainsi à un avenir où la prospérité économique va de pair avec les droits humains et la préservation de l’environnement ». Chez (RE)SET, on pense aussi que la C3DE ne devrait pas être vécue par les entreprises comme une contrainte nouvelle mais bien comme l’opportunité de remettre à plat ce qui doit l’être, dans son propre intérêt. En attendant, ce flou juridique persistant, noté par NOVETHIC, risque de brider les envies : et si les prochains Parlement et Commission européens revenaient sur le projet de directive… ?

Retour en France pour nos rubriques hebdomadaires, avec la victime de son succès de la semaine : la « voiture électrique à 100 euros ». Depuis le début de l’année, 50 000 ménages ont commandé une voiture à 100 euros par mois subventionnée par l’Etat, soit deux fois plus que prévu. Tout ceci n’est pas gratuit, rappelle Libération. L’Elysée a donc annoncé la fin du dispositif, ce dernier ayant « dépassé » ses objectifs initiaux. Il sera relancé en 2025, explique Le Monde. Dans la foulée, le quoi qu’il en coûte ayant laissé place à une certaine rigueur budgétaire, les autres aides pour les véhicules électriques sont amoindries, comme le « bonus écologique », raboté de 1000 euros, expliquent Les Echos.

Côté monde agricole, la mise au point de la semaine nous vient de Arnaud Rousseau, sous la forme d’une tribune publiée dans Ouest France. Le Président de la FNSEA prend des accents presque écologistes lorsqu’il écrit : « Un changement d’état d’esprit doit s’opérer dans l’approche de la relation entre agriculture et environnement. La planification écologique l’exige, car ce défi ne sera pas relevé sans la contribution centrale et majeure de l’agriculture. Les agriculteurs l’exigent aussi car ils sont les premiers à subir les conséquences du changement climatique. Produire notre alimentation en France et en Europe, c’est un acte écologique ! Ne cédons pas à l’hypocrite tentation de nous acheter un espace de vie décarboné en Europe en faisant produire à l’autre bout du monde, à bas prix, des aliments qui ne respectent aucune de nos normes de durabilité. » Chacun(e) applaudit des deux mains, sur ces principes. Ensuite, il y a la façon de le faire. Et là, c’est plus compliqué, semble-t-il. Le diable se cache dans les détails, parlez-en au Premier Ministre.

Le même Arnaud Rousseau, cette fois affublé de sa casquette « Groupe Avril », peut d’ailleurs se prévaloir de la présentation de la « feuille de route de la semaine » : la « transition alimentaire et environnementale » est à l’ordre du jour du groupe céréalier et oléagineux, détaille L’Usine Nouvelle : l’objectif est de décarboner son approvisionnement pour la fabrication de deux de ses huiles vendues sous la marque Lesieur. A compter du mois d’avril, l’intégralité des gammes Fleur de colza et Cœur de tournesol, qui pèsent moins de 10% du chiffre d’affaires de Lesieur, vont devenir les VRP de la démarche « huiles engagées » : 20 millions de litres d’huile végétale sont poussés au  » verdissement « . Une démarche résultante « d’un projet lancé il y a deux ans », dixit Claude-Emma Komly, la directrice RSE de Lesieur. L’ensemble de la chaine de valeur a été associée à sa construction : organismes stockeurs, unités de trituration… sans oublier les agriculteurs évidemment. Dans le sillage des projets d’agriculture régénératrice adoptés par un nombre croissant de géants de l’agroalimentaire, Lesieur se dote d’un cahier des charges discrétionnaire.

La COP discrète, trop discrète de la semaine est numérotée 14 et sauf si vous êtes un lecteur attentif de Libération, vous n’en avez pas entendu parler. Et pourtant elle existe ! La preuve avec son logo :

C’est une COP technique, juridique, pour ne pas dire d’initiés, raconte Libération. Bien moins retentissante que la COP climat, plus méconnue que la COP biodiversité, mais dont l’objet est tout aussi capital pour saisir les bouleversements planétaires en cours. Cette 14e édition de la Convention sur la conservation des espèces migratrices (CEM) a permis aux gouvernements, experts et autres scientifiques, sous l’égide de l’ONU, de s’appesantir une petite semaine sur le sort peu enviable des milliards d’animaux sauvages et nomades qui, chaque année, se déplacent au gré des saisons et des cycles de reproduction. Tous ces poissons, requins, éléphants, caribous, rapaces, albatros, qui remontent les cours d’eau, sillonnent les océans, traversent des rivières, des plaines désertiques, ou pérégrinent au milieu des cieux, parfois sur des milliers de kilomètres, pour atteindre leur nouveau refuge. Aujourd’hui, 44 % de la faune migratrice inscrite sur la liste rouge de la CEM est en voie de déclin (ce qui correspond précisément à 523 espèces). Presque un quart est menacé d’extinction (260 espèces). Afin d’étayer la gravité de la situation et nourrir les débats durant cette COP14, la CEM vient de publier son tout premier bilan mondial sur ces espèces voyageuses fragilisées. Un rapport présentant « les preuves irréfutables du péril » qu’elles encourent, selon les mots d’Inger Andersen, directrice du Programme des Nations unies pour l’environnement. L’occasion de publier cette superbe photo de jaguar utilisée par Libération pour illustrer son article :

Pour rester dans la biodiversité, la grosse bébête de la semaine qui risque de ne pas s’adapter est l’ours polaire, qui fait l’objet d’un article intéressant du Parisien. Le réchauffement climatique ne leur convient guère. Le Parisien présente ainsi le résultat d’une étude inédite menée par des scientifiques de l’USGS et Washington State University. Ils ont eu la bonne idée de placer des caméras sur 20 ours polaires au Manitoba, au Canada. Au terme de dizaines d’heures d’images et de relevés réalisés sur les animaux, les chercheurs en sont arrivés à une conclusion alarmante publiée dans le journal « Nature Communications » : « Bien que les ours polaires terrestres présentent une plasticité comportementale remarquable, nos résultats démontrent le risque de famine », écrivent-ils. Pour une expérience « dans la tête d’un ours polaire », on vous recommande cette vidéo surprenante .

Pour en finir avec la biodiversité, la citation de la semaine que son auteur Hervé Banville, aurait préféré voir oublier est celle-ci, prononcée le 10 mars 2023 au Sénat : « la France et le Gouvernement sont totalement opposés à la mise en œuvre de l’interdiction des engins de fond dans les aires marines protégées ». Mais depuis, Hervé Berville a jouté une corde à son arc de Secrétaire d’Etat : en sus de la Mer, la Biodiversité. Et là il se trouve confronté à la complexité de la transition, une ligne de crète obligeant parfois à tenter de réconcilier l’apparemment inconciliable. L’an dernier, le Secrétaire d’Etat s’était attiré de vives critiques des associations de protection de l’environnement, l’association Bloom allant même jusqu’à déposer une plainte contre lui devant la Cour de justice de la République, plainte classée sans suite. Les journalistes de actu-environnement, qui ont révélé ce « loup », sont coquins.

Et quand il n’y aura plus d’animaux, on pourra toujours manger le « riz de la semaine » ! Il s’agit du riz « augmenté », comme on dit de la réalité ou des soldats. En Corée du Sud, des scientifiques ont créé un riz rose capable de remplacer la viande, révèle Libération : « L’aliment hybride, cultivé en laboratoire, contient des cellules de muscle et de graisse de bœuf. Un produit moins cher, moins polluant, et plus nutritif que le riz ordinaire. » Et qui ne nécessite pas d’élevage… Cette viande 2.0 serait un substitut de plus aux protéines animales, dont l’élevage est l’un des plus gros émetteurs de gaz à effet de serre au monde. Bon appétit !

La marée noire de la semaine a sévèrement endeuillé les jolies plages de Trinité-et-Tobago, dans les Caraïbes après le naufrage d’un navire non identifié (!), mercredi. Elle n’est toujours « pas sous contrôle », a prévenu dimanche 11 février le chef du gouvernement de cet archipel, Keith Rowley, cité par FranceTVinfo en décrétant officiellement l’état d’urgence. Des plongeurs ne sont pas parvenus à boucher la fuite du navire, qui mesure environ 100 mètres de long, et l’Agence de gestion des catastrophes de Tobago a signalé qu’il n’y avait aucun signe de vie sur le mystérieux navire Gulfstream responsable de la marée noire. Il y avait l’avant, il y a l’après :

Avant :

Après :

La dépendance au gaz russe de la semaine est celle de l’Autriche, avec ce chiffre record pour les derniers mois connus : 98% ! Lorsque la Russie a attaqué l’Ukraine le 24 février 2022, l’Autriche importait 80 % de son gaz naturel de la compagnie nationale Gazprom, un chiffre qui est maintenant passé à 98 %. La ministre autrichienne de l’Énergie, Leonore Gewessler, appelle à une action rapide pour inverser cette tendance, cite Euractiv : « La diversification de nos importations de gaz progresse beaucoup trop lentement. Cela se traduit par un nouveau record de 98 % de gaz naturel russe importé en décembre ». Ce chiffre de 98 % représente une augmentation considérable par rapport aux 17 % atteints en octobre 2022, lorsque la Russie elle-même a restreint les flux de gaz vers l’Europe. Mais la tendance s’est rapidement inversée et la part du gaz russe était déjà revenue à 43 % en août de l’année dernière.

L’action dite « radicale » de la semaine nous vient de Florence, où le chef d’œuvre de Botticelli, « La Naissance de Vénus », a été pris pour cible par des défenseurs du climat, raconte La Croix. L’organisation Dernière Génération a commencé à mener des actions non violentes en Italie en 2022 au moment des élections législatives, en appelant les politiciens de tous bords à faire du climat une de leurs priorités. Mais est-ce bien là la radicalité dont la transition a besoin ? Petit rappel : radical vient de racine, la radicalité consisterait à prendre un problème à la racine. Chez (RE)SET, on reviendra bientôt sur ce sujet…

Le retour slicé perdant de la semaine est celui du grand Roger, Federer bien sûr, avec sa marque de basket « On », dont l’ex-numéro un mondial du tennis est l’un des principaux actionnaires et qui joue sur une image de probité et de qualité helvétiques. Petit problème : ces coûteuses chaussures de sport sont en réalité fabriquées au Vietnam. Gênant, quand l’on entend se prévaloir de grands principes « durables » et « éthiques », accessibles d’un clic sur le site de la marque : « Nous innovons pour l’humain et la planète. Dans le futur dont nous rêvons, tous nos produits seront réalisés sans énergie fossile et pensés pour être circulaires – tout en garantissant l’équité et en célébrant la diversité. » Malgré le petit drapeau suisse qui figure parfois à l’arrière de ses baskets, raconte Le Monde, elle les fait fabriquer au Vietnam et les commercialise avec une marge tellement sidérante que le magazine helvétique des consommateurs Ktipp vient de consacrer une enquête à ses prix « scandaleux ». Quand on vous disait que la « C3D » et la vigilance, cela peut éviter, en amont, bien des désagréments !

Le nouvel acronyme de la semaine n’a pas de lien direct avec nos sujets mais on vous le donne quand même, pour le « fun » : vous connaissez les granolas mais quid des GRANOLAS ? Non, ce ne sont pas  les céréales du petit-déjeuner, mais, nous dit Le Monde, l’acronyme né dans le cerveau fertile des analystes de Goldman Sachs pour suivre les actions européennes les plus performantes. On y trouve GSK, Roche, ASML, Nestlé, Novartis, Novo Nordisk, L’Oréal, LVMH, AstraZeneca, SAP et Sanofi. GRANOLAS, donc. Un acronyme moins impressionnant tout de même que l’appellation pour les stars américaines de la bourse : les « Magnificent Seven» Meta, Tesla, Alphabet, Amazon, Nvidia, Apple et Microsoft.

La devinette de la semaine dernière était une liste : quels ont été les dix plus gros pollueurs plastique de 2023 ? L’indice était qu’il s’agissait sans doute de ceux auxquels vous pensez. La preuve dans le classement à l’échelle mondiale établi par l’ONG Break Free From Plastic dans son dernier rapport annuel.

1. The Coca-Cola Company

2. Nestlé

3. Unilever

4. PepsiCo

5. Mondelēz International

6. Mars Inc.

7. Procter & Gamble

8. Danone

9. Altria /Philip Morris

10. British American Tobacco.

La devinette de cette semaine est un chiffre : 2 200 milliards de dollars dans le monde pour la seule année 2023. Mais quel secteur a-t-il bien pu susciter de telles dépenses… ? Un chiffre explosif – c’est l’indice !

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